Dernières lignes, derniers regrets

.         (…) Ne sommes-nous pas tous semblables, parlant sans trêve et à personne, confrontés toujours aux mêmes questions bien que nous connaissions d’avance les réponses ? Alors, racontez-moi, je vous prie, ce qui vous est arrivé un soir sur les quais de la Seine et comment vous avez réussi à ne jamais risquer votre vie. Prononcez vous-même les mots qui, depuis des années, n’ont cessé de retentir dans mes nuits, et que je dirai enfin par votre bouche : « O jeune fille, jette-toi encore dans l’eau pour que j’aie une seconde chance de nous sauver tous les deux !  » Une seconde fois, hein, quelle imprudence ! Supposez, cher maître, qu’on nous prenne au mot ? Il faudrait s’exécuter. Brrr… ! l’eau est si froide ! Mais rassurons-nous ! Il est trop tard, maintenant, il sera toujours trop tard. Heureusement !

FIN

Albert Camus – La chute

ET DEMAIN, LES PREMIERS PORTRAITS DE LORENZO DELL’ACQUA

Une réflexion sur « Dernières lignes, derniers regrets »

  1. En réalité, il est toujours trop tôt et toujours trop tard : trop tôt pour sauver la France d’elle-même, et trop tard pour la sauver de ses ennemis.

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