Archives par mot-clé : Philippe

Les disparus de la rue de Rennes (sixième extrait)

Résumé des chapitres précédents

Une partie non négligeable de la rue de Rennes étant portée disparue, pour éviter le scandale et ne pas risquer de perdre la face devant ses électeurs, Madame Hidalgo a choisi la seule solution politiquement efficace : ne rien faire.

6- La vengeance de Cottard

Où l’on pourra vérifier que la vengeance est un plat qui se mange enveloppé dans du papier journal.

Oui, mais voilà ! Madame La Maire avait compté sans la rancune de Cottard. Il en avait gros sur le cœur, le Cottard. Non seulement il avait réalisé que lorsque ses collègues prononçaient son patronyme en dehors de sa présence, ils le faisaient toujours précéder de « ce con de », mais encore, la façon dont il avait été mis à l’écart de l’affaire de la rue de Rennes l’avait mortifié. Il avait donc décidé de se venger et c’est pour cela qu’il avait déposé Continuer la lecture de Les disparus de la rue de Rennes (sixième extrait)

La colère, l’impuissance et l’angoisse

Ukraine – 730ème jour

Mon café, ce matin, ce sera les Deux Magots.

Ça commence à faire longtemps que j’ai réduit la production du JdC en annulant mes Rendez-vous à cinq heures, en arrêtant les chroniques, les Critiques aisées, les Tavussa et les Nouvelles du front et en réduisant au minimum les réponses aux commentaires et autres provocations. Il faut bien le dire, ça nous a fait à tous un bien fou !
Mais ça fait presque aussi longtemps que mon esprit polémique souffre de garder pour lui ses pointes et ses flèches, ses coups de cœur et ses colères.
J’en suis arrivé au point où je ne peux plus supporter le silence que je me suis imposé. Je n’en peux plus de supporter sans moufter, comme disait mon père, ce que je vois, ce que je devine, ce que j’entends et surtout ce que je n’entends pas sur ce qui se passe autour de nous depuis deux ans et qui se précise davantage chaque jour. Je n’en peux plus de ne pas exprimer ma colère.

Bien sûr, tout ce qui se passe autour de Continuer la lecture de La colère, l’impuissance et l’angoisse

Les disparus de la rue de Rennes (cinquième extrait)

Résumé des chapitres précédents

Devant la disparition inexpliquée de toute une section de rue de Paris, Madame la Maire se demande à qui elle pourrait bien faire porter le chapeau.

5- Si j’aurais su, j’aurais pas venu

Où l’on verra un ex-député de la Corrèze, mais pas celui qu’on pourrait croire, inspirer Anne Hidalgo.

Pourtant, plus elle réfléchissait, plus elle se rendait compte que taire cette affaire était devenu impossible. Trop de monde était désormais au courant : les fonctionnaires de la Mairie parmi lesquels il pouvait toujours rester quelques supporters de l’opposition, les personnes dont les témoignages figuraient dans le rapport de Ratinet, les badauds qui avaient assisté à la stupide visite d’aujourd’hui et parmi lesquels il y aurait bien au moins un journaliste, ou un ami de journaliste, ou un informateur de journaliste, enfin quelqu’un qui parlerait à un journaliste !

De plus en plus consciente de l’impossibilité d’étouffer l’affaire, consciente également de la grande difficulté qu’il y aurait à la faire endosser par l’opposition, Madame la Maire arriva dans son bureau dans un état de nerfs extrême. Après avoir fracassé le portrait officiel du Président de la République contre un radiateur, elle convoqua Hubert Lubherlu à qui elle Continuer la lecture de Les disparus de la rue de Rennes (cinquième extrait)

Go West ! (26)

(…) Une fois dehors, je me suis penché dans la voiture.
— Je suis vraiment désolé, tu sais. Je ne pensais pas que…
— Je vais les tuer, ces filles, m’a interrompu Tavia en faisant rugir le moteur.
Et puis, elle a démarré en trombe en grillant le feu rouge. Je ne l’ai jamais revue.
J’aurais aimé qu’elle me rassure, qu’elle me dise que ce n’était pas ma faute, qu’elle ne m’en voulait pas, mais elle ne l’a pas fait. Elle m’a juste dit « Je vais les tuer, ces filles ».
De toute façon, je ne l’ai jamais revue, Tavia, alors…

J’aurais pu la revoir, Tavia, mais ça ne s’est pas fait. Je suis sûr que j’aurais pu la revoir mais il aurait fallu pour ça que je reste encore un peu dans la ville. Ce qui est certain c’est que j’aurais au moins essayé. Nos premières heures ensemble avaient quand même créé un sacré degré d’intimité et il s’en était fallu de peu pour que… bon enfin, pour que nous nous connaissions mieux. Si j’arrivais à la revoir, notre « amitié » ne partirait pas de zéro. Je trouvais que je n’avais pas trop mal manœuvré dans cette histoire, et il aurait été dommage de renoncer à cet investissement sans même tenter à nouveau ma chance. Bon, d’accord, finalement, nos débuts avaient été assez pénibles, surtout pour Tavia, et ça avait dû laisser quelques traces chez elle. Je ne sais pas comment elle avait pu se débrouiller pour rentrer chez ses parents à neuf heures du soir, seulement vêtue d’une chemise d’homme et d’une vieille couverture enroulée autour de la taille, les pieds en sang et les cuisses zébrées de griffures. Je sais que les filles sont très fortes pour justifier ce genre de situation invraisemblable ; c’est en tout cas ce que nous apprennent les comédies hollywoodiennes et les pièces de boulevard françaises. Mais la crédulité des parents a ses limites et ça n’avait sûrement pas été facile. J’aurais admis volontiers et sans vrai dommage pour mon amour propre que la demoiselle ne veuille plus entendre parler de moi. Mais, bon, ça valait le coup d’essayer.
Seulement voilà, Continuer la lecture de Go West ! (26)

Go West ! (25)

(…) En sortant de l’eau, Tavia poussa un cri. Ses vêtements avaient disparu ! Si les miens que j’avais jetés en hâte au pied d’un pin étaient encore là, ceux de Tavia avaient disparus ! Je me souvenais parfaitement que, pendant que je me déshabillais, elle avait soigneusement plié et empilé ses affaires sur un rocher avec son sac de plage et ses chaussures par-dessus le tout. Ça m’avait étonné et même un peu agacé qu’une fille puisse penser à des trucs aussi peu romantiques que ranger ses affaires, juste avant de… enfin, en de telles circonstances.

Il n’y avait pas de vent, pas la moindre vague ; aucun animal aussi malin soit-il n’aurait pu emporter un chemisier, un short et un maillot de bain, sans parler d’une paire de tennis et d’un sac de plage. Quelqu’un avait pris les vêtements de Tavia et seulement les siens ! Ce ne pouvait être que quelqu’un du groupe. Vraisemblablement une fille. Une fille qui avait voulu faire une blague, une petite plaisanterie, sûrement ; les vêtements devaient être cachés quelque part, pas loin ; nous allions sûrement les trouver. Il suffisait de chercher un peu.
Le ciel au-dessus de nous était encore clair Continuer la lecture de Go West ! (25)

Dans le monde de l’édition (26)

La vente des livres de Coutheillas est en plein marasme. Depuis le 1er février, trois exemplaires seulement des Disparus de la rue de Rennes ont été commandés. Par ailleurs, il n’y a pas eu un seul nouvel avis sur Amazon.fr.
C’est donc avec regret que nous informons les lecteurs du JdC que la sortie du nouvel opus de Coutheillas, « Les trois premières fois
et autres nouvelles optimistes », originellement prévue pour le 1er mars prochain, est repoussée sine die, en espérant que le marché se redresse. Continuer la lecture de Dans le monde de l’édition (26)

Go West ! (24)

(…) Nous, nous avions quitté cet âge du flirt où ces gentilles filles de l’Ouest se trouvaient encore, et quand nous étions entre nous, nous nous flattions d’en demander et d’en obtenir davantage. Mais là, dans ce canyon sauvage, dans cette nature splendide, avec ces jeunes filles sans complexe mais prudentes et maitresses d’elles-mêmes, tacitement, nous avions convenu entre nous des limites à ne pas franchir. Volontairement, pour quelques jours et d’un commun accord, nous étions redevenus des adolescents. Pour quelques jours, je vivrais une adolescence que je n’avais pas connue.
Mais finalement, pour moi, ça ne s’est pas passé tout à fait comme ça… enfin… pas tout le temps. Et j’ai découvert qu’elles n’étaient pas si gentilles que ça, ces filles de l’Ouest.

Tavia avait dix-sept ans. Elle en paraissait vingt. Grande, brune, élancée, silencieuse, elle ne faisait pas partie de la bande habituelle des filles qui nous entouraient et qui, je l’ai compris plus tard, la considéraient comme peu fréquentable. Nous nous nous étions rencontrés au cours d’une partie de bowling. Elle s’entrainait avec l’équipe de son lycée sur la piste voisine de celle où nous étions en train de jouer. Nos deux groupes avaient fini par se mélanger et l’après-midi s’était poursuivi au Museum Club voisin. C’était une sorte de bar-dancing installé dans un grand chalet en troncs d’arbre en bordure de la Route 66. Le soir, le Museum Club était surtout fréquenté par les cow-boys de la région. Ils venaient y boire de la bière, écouter un groupe de country et danser sur sa musique avec leurs petites amies. L’après-midi, le bar Continuer la lecture de Go West ! (24)

Dans le monde l’édition (25)

Depuis le 1er février, date de première parution, un seul exemplaire des Disparus de la rue de Rennes a été commandé. Par ailleurs, pendant la même période, aucun de mes autres livres n’a été vendu.

Si vous vous foutez de savoir pourquoi il manque un bout à la rue de Rennes, si la responsabilité de l’Impératrice Eugénie dans cette disparition vous importe peu, si vous vous moquez de l’avancement de Roger Ratinet comme de votre premier twitt, si vous connaissez déjà la nouvelle manière de penser l’urbanisme d’Anne Hidalgo et, enfin,  si vous pensez qu’elle  va pouvoir terminer son mandat tranquillement, alors continuez comme ça et ne lisez surtout pas « Les disparus de la rue de Rennes ».

Go West ! (23)

(…) Inévitablement, j’étais tombé amoureux. Je suis rentré chez moi, je me suis allongé sur mon lit et j’ai écouté des disques de Nat King Cole et de Johnny Mathis. J’ai fait la gueule à mes parents pendant un mois et j’ai écrit à Patricia deux fois par semaine pendant trois. Et puis un jour, Hervé m’a dit : « Mais pourquoi tu ne viendrais pas en Arizona avec moi ? »
Ben oui, pourquoi ?…

Vous qui m’avez lu jusqu’ici, vous avez vécu avec Go West ! quelques scènes auxquelles mes écrits précédents ne vous avaient pas habitués : une séquence torride dans un quadrimoteur à hélices, sorte de prélude aux expériences d’une Emmanuelle encore à naître, un épisode de sado-masochisme inabouti, une fuite éperdue au milieu de moustiques en folie et d’alligators potentiels, des rencontres inopinées avec l’apartheid, la police et l’homosexualité. Et maintenant que votre héros est arrivé en Arizona, vous vous attendez à quelques péripéties de plus en plus épiques, mêlant amours, chevaux, tribus indiennes et rivières rouges.

Eh bien non, et vous allez être déçus Continuer la lecture de Go West ! (23)

Les disparus de la rue de Rennes (2ème extrait)

Résumé des chapitres précédents

Roger Ratinet, employé à la Mairie de Paris, vient de constater la disparition d’une bonne quarantaine de numéros d’immeubles dans la rue de Rennes. On lui a demandé d’établir en toute hâte un rapport sur cette disparition pour le moins étrange.

Chapitre 2- La charge de la preuve

Où l’on découvrira que prouver un manque n’est pas chose facile et qu’éprouver un manque, non plus.

 C’est donc le 17 février 2023 vers 10 h 30 que notre préposé à la vérification des plaques de rue se rendit en toute hâte sur les lieux, muni de son appareil nippon tout neuf et de son certificat tout frais d’aptitude à la prise de vue numérique.

En arrivant en vue de l’église Saint-Germain des Prés, vint à l’esprit curieux de Ratinet la question suivante : « Comment fait-on pour photographier une rue qui a disparu ? ». Son esprit cartésien résista un temps à passer du particulier au général, mais il fallait bien qu’il cédât. Il céda et passa à « Comment fait-on pour photographier quelque chose qui n’est pas là ? », puis, plus général encore, à « Comment prouve-t-on l’absence d’une chose ? » et enfin à son inévitable universalisation : « Comment prouve-t-on qu’une chose n’existe pas ? ». La tête commençait à lui tourner Continuer la lecture de Les disparus de la rue de Rennes (2ème extrait)