Archives par mot-clé : Woody Allen

 He adored New York !

Morceau choisi

Qui parle le mieux de New York ?  Woody Allen, bien sûr !
Écoutez sa voix off en ouverture de son film Manhattan :

«Chapitre 1 : Il adorait New York. Il l’idolâtrait démesurément… » Non, ça ne va pas… « Il l’idéalisait démesurément. Pour lui, quelle que soit la saison, New York était une ville en noir et blanc qui palpitait au rythme des airs de  Gerschwin.» Euh, non. Recommençons… « Chapitre 1 : Il était aussi dur et romantique que la ville qu’il aimait. Derrière ses lunettes cerclées de noir, était lové le pouvoir sexuel d’un chat de la jungle. » Oh, j’adore ça ! « New York était sa ville, et le serait toujours. Sa vision de Manhattan était trop romantique, comme tout le reste. L’effervescence de la ville le faisait vibrer. New York regorgeait de belles femmes et de types qui semblaient connaître toutes les ficelles de la ville… » Ah ! Trop guimauve pour un homme de mon goût. Essayons quelque chose de plus profond : « Il adorait New York. »

Et maintenant, si vous cliquez sur le lien ci-dessous, vous devriez voir l’excellent trailer de ce merveilleux film:

https://youtu.be/JEoEGW4Hb9w

 

Roaring twenties

Morceau choisi

Je crois vous avoir dit que je me trouvais récemment en Europe. En fait, ce n’était pas la première fois. J’y étais déjà allé il y a de nombreuses années avec Ernest Hemingway.

A l’époque, il venait d’écrire son premier roman. Gertrud Stein et moi l’avons lu. On lui a dit que c’était un bon roman, mais pas un grand roman, qu’il avait besoin d’être travaillé et que ça pouvait alors devenir pas mal du tout. On en a ri. Hemingway m’a mis son poing dans la gueule.

Cet hiver-là, Picasso vivait rue du Bac. Il venait de terminer un tableau représentant une assistante dentaire, nue au milieu du désert de Gobie. Gertrud Stein a dit que c’était un bon tableau mais pas un grand tableau. J’ai dit que ça pouvait Continuer la lecture de Roaring twenties

Woody et les Comiques

« Quand je quand je repense à mes années de stand-up, je dois avouer que les comiques et humoristes d’aujourd’hui me surpassent de beaucoup. Les seules critiques que je pourrais faire, c’est d’abord que nombre d’entre eux sont d’une vulgarité gratuite. N’oubliez pas, je dis gratuite. La vulgarité ne me dérange pas quand elle renforce le comique du numéro, mais dans la libération du langage dans les années 1960, c’est gênant d’entendre les humoristes ponctuer leurs vannes de prétendus gros mots. Apparemment, ils ont l’impression que ça leur donne un côté branché et malin, une outrance ou une liberté, alors qu’en réalité ils pourraient faire le même sketch en employant des mots simples sans s’évertuer si pesamment à produire un effet que la vulgarité, pensent-ils à tort, les aide à atteindre. C’est souvent tellement forcé, tellement lourdingue. Ensuite, il y a ces nouveaux clichés dans la façon Continuer la lecture de Woody et les Comiques

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le comique sans jamais oser le demander

(…) et il m’a enseigné des choses essentielles. Par exemple que de longues tirades d’exposition amènent d’excellentes chutes, qu’il ne faut jamais faire dire à un personnage quelque chose qui ne soit pas parfaitement naturel dans le seul but de préparer la conclusion prévue. Il m’a appris à renoncer à un très bon trait d’humour si, d’une façon ou d’une autre, il interrompait ou ralentissait le récit ; à toujours commencer au début et à aller jusqu’à fin du sketch ; à ne jamais intercaler de scène qui ne s’inscrive pas dans une séquence ; à ne jamais écrire quand on ne se sent pas bien parce que le texte reflétera le manque d’énergie et la mauvaise santé de son auteur ; à ne jamais se montrer compétitif ; à toujours respecter les succès de ses contemporains parce qu’il y a de la place pour tout le monde. Et le plus important, il m’ appris à faire confiance à mon propre jugement : peu importait qui essayait de me dire ce qui était drôle ou ce qui ne l’était pas, ou ce que j’aurais du faire, il me fallait suivre mon intuition.
Woody Allen – Soit dit en passant – Autobiographie – Stock – 2020 – 24,50€

Dans ce court extrait, W.A. parle de Danny Simon, son premier vrai patron dans le monde du show-biz. A cette époque, W.A. a 19 ou 20 ans. Depuis un an ou deux, il écrit des Continuer la lecture de Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le comique sans jamais oser le demander

Les comédies au champagne

Morceau choisi

« Jeune garçon, je préférais entre tous ces films que je surnomme « comédies au champagne ». J’adorais les histoires qui se déroulaient dans des penthouses où l’ascenseur arrive directement et où les bouchons de champagne sautent ; où des hommes suaves tiennent des propos spirituels pour faire la cour à de belles femmes qui se pavanent dans des tenues qu’on porterait aujourd’hui lors d’un mariage à Buckingham.
Ces appartements étaient immenses, en général des duplex, avec de grands espaces blancs, et en y pénétrant, le propriétaire ou invité se dirigeait invariablement vers un petit bar facile d’accès pour servir des cocktails préparés dans des carafes. Tout le monde buvait sans arrêt et personne ne vomissait jamais. Personne n’avait le cancer, il n’y avait pas Continuer la lecture de Les comédies au champagne

Roaring twenties

Morceau choisi

Je crois vous avoir dit que je me trouvais récemment en Europe. En fait, ce n’était pas la première fois. J’y étais déjà allé il y a de nombreuses années avec Ernest Hemingway.

A l’époque, il venait d’écrire son premier roman. Gertrud Stein et moi l’avons lu. On lui a dit que c’était un bon roman, mais pas un grand roman, qu’il avait besoin d’être travaillé et que ça pouvait alors devenir pas mal du tout. On en a ri. Hemingway m’a mis son poing dans la gueule.

Cet hiver-là, Picasso vivait rue du Bac. Il venait de terminer un tableau représentant une assistante dentaire, nue au milieu du désert de Gobie. Gertrud Stein a dit que c’était un bon tableau mais pas un grand tableau. J’ai dit que ça pouvait être pas mal du tout. On en a ri. Hemingway m’a mis son poing dans la gueule.

Je me souviens aussi de Scott et de Zelda Fitzgerald qui venait de rentrer de leur réveillon du nouvel an. C’était en avril. Scott venait d’écrire « Les Grandes Espérances ». . Gertrud Stein et moi l’avons lu. On lui a dit que c’était un bon livre, mais qu’il n’avait pas besoin d’être retravaillé car Charles Dickens l’avait déjà fait. On en a ri. Et Hemingway m’a mis son poing dans la gueule.

On est allé ensuite en Espagne pour voir toréer le grand Manolete. Il m’a semblé qu’il avait dix-huit ans, mais Gertrud Stein m’a dit que non, il avait dix-neuf ans mais en paraissait seulement dix-huit. Je lui ai alors fait remarquer qu’un garçon de dix-huit ans pouvait en paraitre dix-neuf et qu’un garçon de dix-neuf ans pouvait en paraitre dix-huit ; c’était comme ça avec les vrais espagnols. On en a ri. Et Gertrud Stein m’a mis son poing dans la gueule.

Et puis la guerre est arrivée. Hemingway est parti en Afrique pour écrire un livre, Gertrud Stein a emménagé avec Alice Toklas, et moi, je suis rentré à New York pour consulter mon orthodontiste.

(Retranscription d’un sketch de 1965 de Woody Allen)

L’Homme Irrationnel (Critique aisée n°62)

Critique aisée n°62

L’Homme Irrationnel

Woody Allen – Joaquin Phoenix – Emma Stone -Parker Posey

C’est curieux comme je n’ai pas grand-chose à dire sur ce film. C’est sans doute parce que je me sens incapable de disserter sur les théories philosophiques qui l’encombrent. Comme je dis souvent : je n’ai pas les outils.

J’ai donc retenu principalement une réplique, qui constitue en quelque sorte l’ouverture du cours que le nouveau prof de philo va donner à ses étudiants : «There is a difference between a theoritical world of philosophy bullshit and real life» (Il y a une différence entre un monde théorique de conneries philosophiques et la vraie vie).

Abe Lucas est professeur de philo, désabusé, alcoolique, suicidaire et, de surcroit, nouvel impuissant (la question n’est pas de savoir s’il est devenu désabusé, alcoolique et suicidaire à cause de l’impuissance ou bien l’inverse). Il ne retrouvera Continuer la lecture de L’Homme Irrationnel (Critique aisée n°62)

Magic in the Moonlight (Critique aisée 40)

Magic in the Moonlight    (Woody Allen)

Comme avant lui Renoir, Ford, Hitchcock, Altman, Truffaut ou Rohmer, Woody Allen est un homme qui, depuis près de cinquante  ans, construit une œuvre, pierre après pierre. Commencée avec la farce, dont le meilleur exemple est Prends l’oseille et tire-toi (1969), il est passé rapidement à la chronique New Yorkaise intellectuelle et sophistiquée dont Annie Hall (1977) et le magnifique Manhattan    (1978- Ah ! L’ouverture de Manhattan !) sont les modèles. Viendront ensuite dans le désordre des fantaisies (Zelig), des comédies de mœurs (Hannah et ses Sœurs), des chroniques sociales (Radio Days), d’innombrables comédies psychanalytiques (Hollywood Endings) et même de films noirs (Le Rêve de Cassandre).

Depuis quarante ans, Allen sort pratiquement un film par an. Ses quatre dernières productions ont été: Continuer la lecture de Magic in the Moonlight (Critique aisée 40)