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Vous n’aurez pas mille lecteurs

morceau choisi

L’éditeur de Simenon, après avoir lu les tapuscrits des premiers Maigret, lui avait écrit :

1° Vos romans policiers ne sont pas de vrais romans policiers. Ils ne sont pas scientifiques. Ils ne jouent pas la règle du jeu.
2° Il n’y a pas d’amour, tout au moins d’amour comme on le conçoit dans le roman policier.
3° Il n’y a pas de personnages franchement sympathiques ou de personnages franchement antipathiques. Vos romans ne finissent ni bien ni mal. C’est désastreux.
Ce ne sont pas des romans policiers. Ce n’est pas scientifique. Il n’y a pas de jeune premier ni d’héroïne. Pas de personnage sympathique et cela finit mal puisqu’on ne se marie jamais. Vous n’aurez pas mille lecteurs.

Simenon, l’homme sans style

Morceau choisi

Georges Simenon est mort il y a trente et un ans à l’âge de 83 ans. Il fut un écrivain d’une prolixité et d’une diversité exceptionnelle : cent quatre-vingt-treize romans, cent cinquante-huit nouvelles, plusieurs œuvres autobiographiques et de nombreux articles et reportages publiés sous son propre nom, cent soixante-seize romans, des dizaines de nouvelles, contes galants et articles parus sous vingt-sept pseudonymes (source: Wikipédia).
Voici ce qu’Alexandre Vialatte écrivait sur le style de Simenon, l’homme sans style :

Simenon est un cas dans la littérature. C’est même un de ses monstres sacrés, bien que la chose lui fasse de la peine. Or, la littérature commence, et même finit, au style. À la façon dont on raconte, non à la chose qui est racontée. Lisez Chardonne, ou Paul Morand ou Saint-Simon. Pas une phrase d’eux qui ne soit signée. On ne confond pas. Lisez une phrase de Simenon ; elle pourrait être de tout le monde. De tout le monde et de n’importe qui (à condition que n’importe qui n’imite personne). Et c’est quand même un très grand écrivain. Ce problème m’a toujours troublé. Voilà un homme qui a Continuer la lecture de Simenon, l’homme sans style

Écrire comme tout le monde

Morceau choisi

(…) Il en va de lui (Simenon) comme, en peinture, de Dubuffet, qui dit : « Il faut peindre comme tout le monde », et qui répond, quand on lui objecte qu’il peint justement comme personne ne le fait : « C’est parce que je suis le seul à peindre comme tout le monde. » Simenon est le seul à écrire comme tout le monde. Mais, avec sa phrase de tout le monde, il se bâtit un monde à lui, qui ne ressemble à celui de personne. C’est le propre du grand artiste.
(…)
Quant à sa phrase, si elle est neutre, elle n’est pas plate. Elle se méfie simplement de l’éloquence, du pittoresque personnel. « Prend l’éloquence et tord lui son cou », disait Verlaine. « Pas de pittoresque », dit Chardonne. Et Stendhal prenait Continuer la lecture de Écrire comme tout le monde