Archives par mot-clé : NIMBY

¿ TAVUSSA ? (48)  : NIMBY

Contre le projet de troisième aéroport dans les environs de Château Thierry où j’ai une maison, j’avais fait le minimum, c’est-à-dire marché trois-cents mètres dans une rue étroite derrière quatre- vingt-seize personnes, quatre banderoles et trois vuvuzellas. Du troisième aéroport, on n’a plus entendu parler.

Contre l’exploitation des gaz de schistes dans les mêmes environs, j’ai eu mon heure, j’ai fait mon devoir : j’ai écrit quelques textes éclairés de vulgarisation, je suis allé à une manifestation où je n’ai pas eu peur — un peu quand même — de me mêler à la CGT et Eva Joly, j’ai assisté à une réunion catastrophiste où une sénatrice — Dieu ait son âme — expliquait aux agricultures comment ils pouvaient violer la loi. J’ai assisté à une conférence à Sciences Po où un député expliquait que le projet était définitivement enterré — c’est le cas de le dire — car mortel électoralement parlant. Il reste bien ici et là au bord d’une route quelque pancarte vindicative à pâlir sous la pluie mais, du gaz de schiste, on n’a plus entendu parler.

Contre la construction dans les mêmes environs — nous avons par ici des environs très recherchés — d’une dizaine d’éoliennes, là, fatigué, je n’ai rien fait. Je n’ai pas écrit, je n’ai pas protesté, je n’ai pas marché. Et, du coup, elles sont là. Il n’y en a que neuf, mais elles sont là, toutes blanches, toutes propres. Elles tournent lentement au-dessus des champs et des prés. Il y a bien quelques écologistes rurbains qui, tels des Don Quichotte pré-apocalyptiques, se sont plaint de la gigantesque présence de ces moulins à vent, évoquant à la fois un préjudice esthétique, un danger pour la sécurité des oiseaux et la santé mentale des agriculteurs. Mais les voisins, les vaches, les piafs et le maïs ont l’air de s’en foutre totalement. Alors, moi aussi, je m’en fous. Je trouve même ça plutôt beau. Il y a des jours de brouillard et des jours de moisson où leurs silhouettes immobiles sont fantasmagoriques, des jours de beau temps où la brise leur donne une sorte de majesté joyeuse, et des jours de mauvais temps où le passant humide et maussade sous la tempête se console en pensant à des kilowatts-heures.
Non, moi, les éoliennes, finalement, je suis pour. En tout cas, ça distrait.

 

ET DEMAIN, THÉOPHILE GAUTIER, QUEL STYLE !