Seul sur Mars (Critique aisée n°67)

Seul sur Mars (The Martian)
Ridley Scott-2015
Matt Damon

Eh bien, moi, j’ai trouvé ça pas mal du tout.

On m’avait dit, tu verras, c’est long, il ne se passe presque rien, on s’ennuie. Pour ce qui est de la longueur insupportable, j’avais déjà donné avec Les huit salopards , dont j’ai dit tout le bien qu’ils méritent. (Je profite de cette occasion pour souligner que les quatre critiques du Masque et la Plume se sont montrés tous d’accord avec moi. Danièle Heymann a même dit de la musique de Morricone qu’elle en avait jusque-là). Pour ce qui est de la longueur honorable, j’avais aussi donné avec The Revenant, dont vous ne lirez ma critique que prochainement, le film n’étant pas encore sorti. Enfin, avec Le pont des espions, tout en admirant la technique du réalisateur, je m’étais légèrement ennuyé.

Eh bien, dans ce film dans lequel un type seul sur la planète Mars passe presque deux ans à faire pousser des pommes de terre, je ne me suis pas ennuyé une seconde. Le scénario est presque vraisemblable. On est très loin des acrobaties funambulesques et des rebondissements ridicules de Galaxy (la scène où Sandra Bullock, qui tombe littéralement de la lune ou des étoiles, se retrouve en petite culotte sur une plage de Chine atteint un sommet du ridicule inespéré et réjouissant). On nous épargne la philosophie de magasin bio de Interstellar (Ce n’est pas l’aaamour qui va sauver l’astronaute, c’est la débrouille et la persévérance).

Les images sont belles, mais dans l’espace, c’est la moindre des choses. L’action est lente mais bien menée. Il n’y a pas de retournement de situation au beau milieu du film, genre deuxième tempête catastrophique ou apparition d’un petit homme vert omniscient. Il y a juste un personnage sympathique, incarné par un acteur sympathique.

Le film n’atteint pas les sommets de l’Etoffe des héros ou d’ Apollo 13, mais on ne s’ennuie pas du tout.

Et c’est pas tous les jours.

6 réflexions sur « Seul sur Mars (Critique aisée n°67) »

  1. Néanmoins, je comprends le point de vue de Paddy.
    Effectivement, il n’y a qu’une petite minorité de critiques de films qui mentionnent, s’intéressent à, ou critiquent, la bande originale, voire les reprises, qui font l’ambiance musicale du film.
    Parce que l’on est critique d’un art visuel, faut-il pour autant en oublier la bande son? Pourtant, les critiques mentionnent les dialogues. Bien sûr. Normal. Que serait un film, oeuvre visuelle, sans ses dialogues? Partant du constat que le visuel ne suffit donc pas à nous retenir dans la salle pendant deux heures, pourquoi passer sous silence l’autre volet de la bande son… La musique?
    Une musique, bonne ou mauvaise, fait beaucoup pour ou contre le succès du film. Pour reprendre le cas d’Ennio Morricone, que serait le film Le Professionnel, ce face à face entre Belmondo et Robert Hossein, sans la musique? Un régal, qui rythme de bout en bout le film. Une bande originale, une vraie. Celle-ci se vendit, en 45 et 33 tours, comme des petits pains, et devint par elle-même si connue que Royal Canin s’en servit, des années plus tard, pour l’une de ses publicités. Si si, celle avec le berger allemand qui court à larges foulées. Immédiatement, quiconque connait le film repense à Belmondo, si fort, si grand. Rhhhâââ, si ces croquettes peuvent faire de mon chien le Bébel des chiens, j’achète!
    Ou, toujours avec une bande originale d’Ennio Morricone , que serait le film « Il était une fois dans l’Ouest » sans le lancinant harmonica ni la terrible et envoûtante musique? La b.o. Ajoute un élément glaçant, tendu, et ajoute encore à l’esthétique du film, que l’on n’imagine même pas sans cet élément essentiel et intrinsèque.
    Mais cela est valable dans l’absolu, pour d’autres qu’Ennio M. Imagine-t-on écouter Amadeus sans la musique de Mozart? Alors que j’écris cette phrase, j’entends et vois ressurgir au fond de moi et se dérouler la scène terrible où Constance Mozart, ayant pris conscience que son mari lui manquait, voyage de nuit sur les routes cahotantes, au grand galop des chevaux de la malle-poste, pour rentrer chez elle, tandis que son génial et mourant mari compose le Requiem qui sera a gloire posthume. Les deux scènes se jouent en alternance, ces chevaux lancés au grand galop, et cet homme épuisé, ruisselant, qui dicte à son ennemi ce qui peut s’apparenter à ces dernières volontés, le tout rythmé par l’orageux et sublime Requiem. Imaginez donc…. Amadeus sans une seule note de Mozart! Ce serait non seulement triste, ce serait risible.
    Mais l’on atteint des sommets avec les comédies musicales, dont les critiques mentionnent souvent les paroles des chansons, mais passent rapidement sur, ou passent sous silence, la musique, pourtant essentielle. Prenez Cats, dont la majorité des paroles sont des poèmes de T.S. Eliot, le livretétant la fidèle adaptation de son recueil Old Possum’s Book of Practical Cats. La musique occupe dans cette comédie une place de choix, et tout à fait en adéqution vec le thème. Quiconque a déjà observé un chat marcher, bouger, sauter entendra dans la musique le rythme des pattes et des déplacements. D’où, sans aucun doute, le succès immense et continu de Cats (dont, par ailleurs, je vomis la traduction française, berk), car le tout, musique, paroles, costumes, chorégraphies, décors démesurés, forme un ensemble cohérent et inoubliable.
    D’où, messieurs les critiques… N’oubliez pas la musique. Et, comme l’on voyait dans les saloons du Far West, sur les pianos… Don’t shoot the piano player!

  2. Bonne réponse . Pourquoi cette obstination à vouloir te convaincre sur un art apprécié selon ses propres jugements ?

  3. Bon! Je ne voudrais pas entretenir la philipique mais quand même, Ennio Morricone mérite un avocat. On l’associe généralement à Sergio Leone, mais il a écrit beaucoup d’autres choses, beaucoup de bandes originales (original soundtracks disent les américains, ce qui va alimenter mon propos). Je comprends parfaitement qu’on puisse ne pas aimer les films de S Leone et rejeter le tout avec l’eau du bain: scénario, prise de vue, bande son, etc. (Ce n’est pas mon cas). Cela ne fait pas d’E Morricone un piètre compositeur, pompeux ou pompier. Comme tout bon et vrai compositeur d’une bande son, ses compositions ont, me semble-t-il, toujours répondu à ce que les producteurs et réalisateurs attendaient de lui pour leurs films. C’est là le rôle de la musique, en participant de la bande son, qui lui était assigné: être en harmonie avec tous les autres éléments du film pour sublimer le tout. En ce sens il est l’un des plus grands, reconnu, j’ose à peine dire unanimement, par ses confrères et le monde des producteurs. E Morricone appelle ça « de la musique appliquée » par opposition à « musique absolue » qui reléve de la seule créativité et responsabilité de son compositeur. De mon point de vue, une musique (bande son) ne sauvera jamais un mauvais film (scenario raté, réalisateur et acteurs médiocres, prise de vue d’amateur, etc) même si le compositeur est très bon par ailleurs. C’est probablement arrivé souvent à E Morricone dont la filmographie est impressionnante. Un mauvais compositeur n’apportera rien de bon à un film, il pourra même le gâcher. Une bonne musique peut toutefois apporter beaucoup à un scénario plutôt plat. J’ai de nombreux exemples. Quant aux critiques faites par les professionnels de la chose, Oui, elles ne m’intéressent pas pour différentes raisons. J’y vois trop souvent un parti pris en fonction de leurs goûts personnels, de « l’intelligence » qu’ils souhaitent donner à leur propos, de la chapelle à laquelle ils appartiennent. Je préfère écouter ce que pensent les amateurs et mes amis dont je connais les goûts, et surtout me faire ma propre idée. Par exemple, après avoir lu la critique aisée de « les 8 Salopards » dans le JDC, je suis aller voir sur internet ce qu’en pensait LA critique. Une seule justement mentionnait la musique d’E Morricone: Daniele Heymann, dans Marianne (je viens de la retrouver). Manifestement elle n’a pas aimé ce film, mais elle a aussi écrit: « Parce que la musique d’Ennio Morricone n’est pas formidable, j’ai tout de suite eu envie de retourner voir les films de Sergio Leone comme « le bon, la brute et le truand » ». Je crois comprendre qu’elle aime la musique d’Ennio Morricone, comme je la comprends! Désolé d’avoir été si long, et pourtant il y a tant de choses que j’aimerais ajouter si j’avais le temps ce soir de les ordonner.

  4. « s’ils se sont spécialisé dans le cinéma, c’est parce qu’ils ne comprennent rien à la musique ni à son rôle »
    J’avoue ne pas bien comprendre la logique de cette phrase. Cela veut-il dire que s’ils comprenaient la musique, ils se seraient spécialisés dans quelque chose d’autre ? Probablement pas, mais ça ne doit pas vouloir dire non plus que s’ils comprenaient la musique, ils se seraient spécialisés justement dans la musique.
    Quoi qu’il en soit, on peut très bien ne pas apprécier un compositeur, même si c’est le favori du public, et être conscient du rôle important de la musique dans un film. Autrement dit, ce n’est pas parce qu’on n’aime pas la production pour le cinéma d’un certain compositeur que, par généralisation, amalgame ou je ne sais quoi d’autre, on n’aime ni la musique de films, ni les autres compositeurs, et pourquoi pas, que l’on ne comprend rien au cinéma. Je ne suis pas souvent d’accord avec les critiques du Masque, mais je dois leur reconnaitre quelque chose, c’est que le cinéma, ils connaissent.

  5. Si certains critiques de métier se sont spécialisés dans le domaine particulier du cinéma c’est probablement, me semble-t-il, parce qu’ils ne comprennent rien à ce qu’est la musique, son art, son rôle en association ou en complément, etc. Mais au delà, je m’interroge aussi sur leur compréhension du cinéma et de ses mécanismes, et notamment le rôle d’une bande son. Ils en sont peut-être restés à la simple découverte du « cinéma parlant » (cf Singing in the rain).

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