Écrire : le pourquoi et le comment (2/3)

temps de lecture : 2 minutes

Suis-je vraiment contraint d’écrire ?

Suis-je vraiment contraint d’écrire ? Creusez en vous-même vers la plus profonde réponse. Si cette réponse est affirmative, si vous pouvez faire front à une aussi grave question par un fort et simple : « Je dois », alors construisez votre vie selon cette nécessité. Votre vie, jusque dans son heure la plus indifférente, la plus vide, doit devenir signe et témoin d’une telle poussée. Alors, approchez de la nature. Essayez de dire, comme si vous étiez le premier homme, ce que vous voyez, ce que vous vivez, aimez, perdez.
Rainer Maria Rilke

…Et revenez toujours à la souffrance.
Lorsque vous susciterez chez les autres un mélange de pitié effrayée et de mépris, vous saurez que vous êtes sur la bonne voie. Vous pourrez commencer à écrire.
Michel Houellebecq

Il n’y a pas d’écriture qui vous laisse le temps de vivre. On ne peut pas faire l’économie de ça. Si vous faites l’économie de ça en faveur de la vie vécue, vous n’écrivez pas. On n’est personne dans la vie vécue, on est quelqu’un dans les livres. Plus on est quelqu’un dans les livres, moins on est dans la vie vécue.
Margerite Duras

 (…) il m’a enseigné des choses essentielles. Par exemple que de longues tirades d’exposition amènent d’excellentes chutes, qu’il ne faut jamais faire dire à un personnage quelque chose qui ne soit pas parfaitement naturel dans le seul but de préparer la conclusion prévue. Il m’a appris à renoncer à un très bon trait d’humour si, d’une façon ou d’une autre, il interrompait ou ralentissait le récit ; à toujours commencer au début et à aller jusqu’à fin du sketch ; à ne jamais intercaler de scène qui ne s’inscrive pas dans une séquence ; à ne jamais écrire quand on ne se sent pas bien parce que le texte reflétera le manque d’énergie et la mauvaise santé de son auteur.
Woody Allen

5 réflexions sur « Écrire : le pourquoi et le comment (2/3) »

  1. En fait je n’ai pas besoin de me le reprocher les autres s’en charge. Pour la subtilité il est bienvenue celui qui en saisi les nuances. Cela change des gros talons et de la mise au pas. Ce n’est pas gagné d’avance de démonter les rouages des automatismes contingent une culture populaire autosuffisante. Dans la revue Science humaine, de juin si je ne m’abuse, Boris Cyrulnique raconte comment la logique a mené la penée à condaner les affricains à l’esclavage. C’est la paresse intellectuelle du petit fonctionnaire qui a permis que ce cénario se mette en place. Autre temps autre moeurs pourrait-on dire, ce serait un oximore quand on voit toutes les contradictions conséquantes des évènements produisant l’histoire. C’est une déclaration évasive que bien des « éducateurs » évoquent pour prendre un racourci justifiant les actions prisent. On veut des éléments simples pour comprendre sans se donner des outils pour comprendre la complexité du monde. Ce cher Léo Ferré évoquait cela en disant « les moules ont été prêt demain matin » dans la solitude, qui selon moi relevait d’avantage de l’isolement puisqu’il s’agit de la position que l’on prend dans l’exclusion, contrairement à la solitude qui tient compte de ce qui est autre.

  2. Bonsoir Claude et bienvenue pour ton retour parmi nous avec tes commentaires imperceptiblement subtils et impénétrablement explicites.

  3. Écrire est un acte conscient et la conscience ne nous sert pas, elle est nous. Alors pourquoi vivre hors de la nature en sachant que tout est interdépendant? On peut vivre dans l’inconscience et finir dans la nature les écologiste nous le rappelle régulièrement chez elle tout est conséquent. Mettre le feu avec l’écriture reste un acte inconscient puisqu’il s’agit de maintenir une finalité en cachant les options permettant la maîtrise de la lecture, c’est à dire soit l’option d’une entente sur des interprétations possibles différentes de l’intention initial du à une syntaxe confuse, ou de l’impolitesse de lire trop rapidement pour ne comprendre que ce qu’elle veut bien appréhender.

    Outre le fait de provoquer la pitié chez les autres par nos malheurs, il y a tout de même un plaisir à l’écriture qui est un accès à la découverte. Elle est la synthèse consciente d’une protestation bienveillante dans sa capacité à la réalisation de sa formation.

  4. Tandis que Rilke dit qu’il faut savoir si l’on doit écrire ou non, Houellebecq affirme que la souffrance est nécessaire, jusqu’à susciter chez les autres pitié et mépris — et il en sait quelque chose, le bougre — Marguerite nous dit qu’écrire, c’est un métier ou plutôt une vie à plein temps.
    Quant à Woody, il ne nous parle que de technique, qui vise, encore un, à la simplicité.
    Effectivement, comme l’a remarqué Jim, aucun de ces écrivains-là, à l’instar de ceux qui étaient cités avant-hier, n’évoque ni la nécessité de l’existence ni même le concept de lecteurs.
    Pourquoi ?
    Pour plusieurs raisons, dont la plus simple, la plus évidente, et souvent la meilleure, est que l’acte d’écrire vient avant toute lecture possible. Cette chronologie naturelle et indubitable fait que l’écriture est indépendante de la lecture, comme l’éclair est indépendant
    de l’incendie qu’il allumera peut-être dans la forêt de pins.
    La foudre tombe avant le feu et qu’elle mette le feu ou pas, elle s’en fout, la foudre. Il faut qu’elle tombe. On verra bien après.

    Ne nous cachons pas que dans leur très grande majorité, les écrivants aiment bien être lus, ou qu’ils aimeraient bien l’être. Il y a ceux pour qui c’est une nécessité matérielle, ne serait-ce que pour pouvoir continuer à écrire. Il y a ceux pour qui c’est une nécessité psychologique, la satisfaction d’un obscur besoin de reconnaissance ou d’approbation. Et puis, il y a ceux pour qui la naissance d’un lectorat est une sorte de divine surprise, ou qui le prétendent. Bien sûr, il y a aussi ceux qui ne veulent pas être lus, les auteurs de journaux intimes, mais même pour ceux-là, ce n’est pas tout a fait certain.
    En bref, il ya donc des écrivants qui veulent être lus. C’est d’accord. Mais est-ce bien pour cela qu’ils écrivent. En d’autres termes, s’ils avaient la certitude de ne pas être lus, cela les empêcherait-il d’écrire ?
    Pour continuer à filer la métaphore de tout à l’heure, et moyennant un peu d’antropomorphisme, imaginons que la foudre aime mettre le feu et qu’elle adorerait voir flamber la pinède. Pourtant, ce n’est que très exceptionnellement que la foudre arrive à mettre le feu à quoi que ce soit. En une année, sur le seul territoire français, elle tombe des centaines de milliers de fois, mais c’est bien le diable si elle arrive à foutre le feu à une pauvre petite cinquantaine de baraques, quelques centaines d’arbres et une demi-douzaine de pinèdes. Et pourtant, elle tombe, la foudre. C’est son truc à elle, de tomber. C’est dans sa nature. Et si ça fout le feu, tant mieux. Sinon, tant pis.
    Eh bien, pour celui qui écrit, c’est pareil.
    J’ai parlé
 !

  5. Ce qui m’a frappé dans les citations précédentes et celles-ci est qu’aucune ne mentionne la nécessité d’un lecteur, sauf peut-être Houellebecq avec « vous susciterez chez les autres » mais là encore sans spécifier qui sont les autres. La nécessité d’avoir des lecteurs, donc des éditeurs, sera tout simplement pour certains écrivains la condition d’un revenu pour assurer leur besoin d’écrire et de s’exprimer, mais pour d’autres plus prosaïquement une façon de gagner leur vie en exploitant un talent. Mais alors, si la nécessité d’un lecteur n’est pas mentionnée, serait-ce qu’il n’est pas essentiel et peut-être remplacé par un auditeur….

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