AVENTURE EN AFRIQUE (17)

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Le parc du W

Le parc du W se trouve à environ 150 km au sud-est de Niamey. Ce complexe naturel transfrontalier de 10 000 km² ( 100 km X 100 km) se trouve à cheval sur le Niger, le Bénin, le Burkina-Faso. Crée en 1954, il a été reconnu « Réserve de biosphère » en 2002 par l’UNESCO. Il doit son nom à la forme en W que dessinent une série de méandres du fleuve Niger en ces lieux. Il est réputé pour ses grands mammifères : éléphants, hippopotames, lions, servals, antilopes, girafes, buffles, phacochères,… Nous nous y sommes rendus,

avec les trois 2CV en février 1973 et avons bénéficié du campement de la Tapoa pour y passer la nuit. Nous avons eu beaucoup de mal à nous endormir. Un lion rodait autour du campement et l’on entendait ses grognements… à deux reprises il a rugi. Au loin aussi, des éléphants barrissaient. Dans les arbres autour du campement de nombreux oiseaux piaillaient ou poussaient des cris stridents. Tous ces bruits ne nous étaient pas familiers et nous étions un peu inquiets.

Le lendemain dans chaque véhicule nous étions accompagnés d’un guide en arme. Nous n’avons jamais su si les fusils des guides ou gardes étaient équipés de munition. En tout cas ils avaient fière allure dans leur rôle avec leur arme à la main. Il est difficile lorsque l’on circule sur les pistes très empoussiérées d’apercevoir des animaux sauvages et encore davantage de les photographier. A un moment un troupeau de buffles nous a coupé la route, seule la voiture de tête a pu les voir. Nous avons néanmoins eu la chance d’observer bon nombre de : gazelles, antilopes, cobs, singes, phacochère. À la fin de la journée, au loin, nous avons aperçu un troupeau d’éléphants. Il aurait fallu passer plusieurs jours pour les approcher davantage.

Avant son départ, j’avais demandé à Jean-Georges Martinet s’il avait pu travailler quelques semaines en doublon avec son prédécesseur. Il m’a répondu que non et m’en a donné la raison. Son prédécesseur, issu de la même école que lui, faisait un jour avec son équipe un relevé près du campement du parc du W. A un moment il n’avait plus aperçu le porte mire dans la lunette. Il avait levé les yeux par-dessus l’appareil et là à une quinzaine de mètres il y avait une lionne qui le regardait. Que faire, pas de gardes armés à proximité, pas de guides et ses aides semblaient s’être volatilisés… personne, tout le monde avait disparu. La Land Rover était dans son dos à une trentaine de mètres. Il avait pris alors  l’appareil topo et pointa les trois pointes du trépied en direction de la lionne. Puis il avait entrepris de reculer lentement espérant rejoindre son véhicule. Le félin avançait en guettant sa proie pour n’être plus qu’à quelques mètres de l’homme. Lorsque qu’il senti la tôle de son véhicule dans son dos, la lionne était au contact de l’extrémité du trépied. Il avait réussi à s’introduire dans la cabine de sa voiture qui était déjà occupée par ses deux aides tremblants. La lionne avait rodé de longues minutes autour du véhicule avant de s’éloigner. Jean-Georges m’a expliqué que la très grande frayeur avait rendu malade le jeune homme et qu’après avoir contracté une hépatite s’en était suivi une dépression nécessitant son rapatriement avant la fin de son contrat. Jean-Georges tenait cette histoire des aides de la Section Topo qui s’étaient réfugiés dans la Land Rover à l’approche de la lionne. Quelque temps après notre visite, un copain VSNA de la Section Travaux du Génie Rural, du nom de Testa, avait eu envie d’aller voir les éléphants. C’était un célibataire appréciant « les soirées chaudes de Niamey » ! Il avait acheté une Méhari-Citroën. Il s’était rendu au campement de la Tapoa pour y rencontrer des guides afin de savoir où trouver le troupeau d’éléphants le plus proche. Il arriva sur le lieu indiqué et les aperçus au loin. Il quitta la piste et s’engagea dans la savane en voiture. Tout un secteur avait été l’objet quelques années auparavant d’un incendie et dans l’herbe il y avait de caché des restes de pieds de buissons calcinés très durs et pointus de quelques centimètres de hauteur. Alors qu’il était tout proche du troupeau d’éléphant il se retrouva avec un pneu à l’avant et un autre à l’arrière de crevés au moment même où un grand mâle s’était détaché du groupe et venait à sa rencontre. Testa continua à légèrement à avancer mais cela ne plut pas à l’éléphant qui le signala en battant ses oreilles et en avança en direction de la voiture. Testa fit difficilement demi-tour pour rebrousser chemin, l’éléphant à ses trousses manifestant son mécontentement en barrissant à grand bruit. L’éléphant se rapprochait de plus en plus, sur le terrain chaotique la Méhari avait du mal à prendre de la vitesse. Testa arriva enfin à rejoindre la piste avec trois roues crevées et l’éléphant à une dizaine de mètres derrière lui. Il commença à prendre un peu de vitesse. Est-ce par fatigue ou a-t-il estimé sa mission remplie, l’éléphant décrocha. Testa rejoignit tant bien que mal le campement encore choqué et raconta sa mésaventure aux gardes. Ceux-ci lui dirent : « l’éléphant a chargé l’homme, il faut l’abattre car il recommencera ». La chose fut faite. Testa était très fier de faire voir une splendide photo en noir et blanc qu’il avait réussi à prendre, où l’on voyait l’éléphant en train de le charger, avec de la poussière à ses pieds, les oreilles écartées, des branchages qui giclaient autour de lui. Dans l’émotion il ne se rappelait plus comment il avait réalisé cette prise de vue. Son aventure et sa photo firent le tour des coopérants.

 

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