¿ TAVUSSA ? (81) : ODEON 84 00

L’autre  jour, visité Versailles.

Très beau, très chouette, je vous le recommande, surtout quand il y a peu de monde et qu’il fait beau comme ce jour-là.

Après avoir passé sans encombrement les diverses barrières et contrôles qui donnent accès au château royal, nous sommes entrés tout d’abord et comme il se doit dans la chapelle. Magnifique endroit plein de dorures.

Là, l’atmosphère est recueillie et un silence presque total règne parmi la petite foule des visiteurs. Au bout de quelques instants, on est troublé dans son recueillement et son admiration par une voix grave qui donne l’heure : « …sera exactement dix heures douze minutes et vingt secondes… dix heures douze minutes et quarante secondes… » Vous n’aviez pas entendu ça depuis la dernière fois que vous aviez composé  sur le cadran rotatif de votre téléphone en ébonite noire ODEON 84 00, c’est à dite en 1965, probablement.

Vous cherchez la source de cette information et vous la trouvez bientôt dans une série d’enceintes acoustiques sur pied dispersées dans la chapelle. Alors vous pensez innocemment qu’on prépare un concert et que l’horloge parlante est utilisée par l’ingénieur du son pour les réglages de la sonorisation, et vous vous dites, débonnaire, « Bon, c’est dommage qu’il fasse cela pendant les heures de visite, mais si c’est pour la Musique … »

Mais vous ne tardez pas à tomber sur le cartel qui vous explique la vraie raison de la rengaine qui emplira la chapelle du matin jusqu’au soir et jusqu’au 6 novembre prochain.

Ce cartel, le voici :

Hommage à Christian Boltanski (1944-2021)

L’horloge parlante (2003)

La chapelle royale accueille aujourd’hui une œuvre singulière : sous ses voûtes baignées de lumière, une voix égrène les heures, les minutes et les secondes. Cette horloge parlante, vanité contemporaine, compte parmi les créations phare de Christian Bolanski, immense artiste plasticien disparu le 14 juillet dernier.

Imaginée en 2003, puis créée en 2009 pour la crypte de la cathédrale de Salzburg, en Autriche, cette réalisation sonore est réactivée dans nos murs pour la première fois depuis sa conception, en hommage à son créateur.

Un hommage qui puise sa force à la source d’un art engagé : pour Boltanski, en lutte contre la finitude et l’oubli, attaché à reconstituer la vie des êtres à travers leur « petites mémoires » et à esquisser, grâce à elle, une mémoire collective, rien ne fut plus essentiel que le souvenir.

*

Et là encore, le Béotien indécrottable que je suis ne peut que ranger ça dans le tiroir des « Bidons de l’Art » et répéter ce qu’il a trop dit pour être publié dans Télérama :

Ras le bol, l’Art contemporain !

Je ne connaissais pas Christian Boltanski, et le fait qu’il soit mort très récemment me met dans l’embarras pour dire ce que je pense vraiment de son horloge parlante. Par ailleurs, je ne voudrais pas juger l’artiste uniquement sur cette installation, mais je n’ai pas envie de me taper le reste de son œuvre pour avoir un avis motivé.

Alors, tant pis, j’y vais : cette horloge parlante est une fumisterie de plus. Pourquoi, tant qu’on y est, ne pas diffuser en permanence dans cette chapelle le bulletin météo de la Corrèze inférieure ou y présenter le tableau d’affichage des départs des trains de la Gare Saint-Lazare ? Je suis certain que les spécialistes des cartels arriveront sans effort à trouver toute une symbolique derrière des trucs comme ça.

Mais, je me demande : Christian Boltanski était-il un humoriste, un amateur de canulars, un cousin éloigné de Boronali ? Si c’est le cas, je lui présenterai dès que possible mes excuses pour mon jugement hâtif.

Au moment de conclure, Wikipédia m’informe que Boltanski fut à la fois soutien actif de François Hollande et compagnon d’Annette Messager, dont ni la présidence de l’un ni les accumulations de petits oiseaux morts habillés de tricots de laine de l’autre ne laisseront un souvenir de franche rigolade. Il est donc pratiquement exclu que l’horloge parlante de Versailles soit une plaisanterie. Dommage…

Bientôt publié

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Une réflexion sur « ¿ TAVUSSA ? (81) : ODEON 84 00 »

  1. Il y a trois numéros de téléphone qui ont marqué mon enfance, les seuls que je n’oublierai jamais:
    POR 70 73 (Port Royal), notre premier téléphone obtenu chez nous en 1950.
    ODE 84 00, l’horloge parlante.
    BAL 00 01(Balzac), numéro de Jean Mineur Publicité dont les spots étaient diffusés dans le cinéma, les quatre chiffres 0001 parfois repris en chœur par l’audience.
    À l’époque, l’horloge parlante donnait une heure absolument exacte à la seconde prés toutes les minutes avec l’annonce rituelle « au quatrième top il sera exactement (par exemple) neuf heures, sept minutes et zéro secondes, top top top TOP ». Ce message émanait de l’Observatoire de Paris, à l’extrémité de l’avenue de l’Observatoire, face au Palais de Luxembourg. Les sourds ou ceux qui ne possédaient pas le téléphone, pouvaient y aller régler leur montre à l’heure exacte en regardant le cadran circulaire de la pendule se trouvant sur le fronton, il y est toujours, à condition de na pas être aveugle bien sûr. Une photo de la façade de l’Observatoire avec sa fameuse pendule a été récemment diffusée sur le JDC je crois.

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