La vieillesse

Et maintenant je comprenais ce qu’était la vieillesse – la vieillesse qui, de toutes les réalités, est peut-être celle dont nous gardons le plus longtemps dans la vie une notion purement abstraite, regardant les calendriers, datant nos lettres, voyant se marier nos amis, les enfants de nos amis, sans comprendre, soit par peur, soit par paresse, ce que cela signifie, jusqu’au jour où nous apercevons une silhouette inconnue, comme celle de M. d’Argencourt, laquelle nous apprend que nous vivons dans un nouveau monde ; jusqu’au jour où le petit-fils d’une de nos amies, jeune homme qu’instinctivement nous traiterions en camarade, sourit comme si nous nous moquions de lui, nous qui lui sommes apparu comme un grand-père.

Marcel Proust. Le temps retrouvé

6 réflexions sur « La vieillesse »

  1. J’avais lu ton texte et le trouver très touchant, je me suis dit tiens Philippe parle de lui, j’aime bien !

  2. Si je me souviens bien, le Chateau de ma mère finit sur une note triste car il y évoque la mort de sa mère, survenue alors qu’elle était très jeune encore.

  3. Cette fin du Château de ma Mère est effectivement triste ce qui pourtant ne semble pas correspondre à la personnalité de Marcel Pagnol, en tout cas ce qu’on peut en savoir au travers de son œuvre. Quant à se rêver en vieillard, c’est vrai que cela semble invraisemblable. Faudra attendre quelques années encore et l’expérience qui viendra avec.

  4. En moins triste, je me permettrai de me citer personnellement moi-même :
    « …Vieillir est donc la plus grande surprise qui puisse arriver dans la vie d’un homme. Mais pourquoi est-ce une surprise ?
    Mais parce qu’à l’intérieur, ce n’est pas du tout pareil !
    Parce que, à l’intérieur, on a toujours, selon les circonstances, dix-sept, vingt-cinq, trente-cinq ans, ou bien pas d’âge du tout.
    La preuve : quand on rêve, est-ce qu’on s’est jamais vu en vieillard ?
    Non, en dedans, tout est comme avant. »
    Cf-Vieillir, (c) Le Journal des Coutheillas, 2014.

  5. Eh oui, la vieillesse, si bien évoquée par certains auteurs tels que Marcel PROUST le fait ici. Je citerai en complément cette évocation d’un autre Marcel: « Telle est la vie des hommes. Quelques joies, très vite effacées par d’inoubliables chagrins. Il n’est pas nécessaire de le dire aux enfants ». Marcel PAGNOL, Le château de ma mère (dernière phrase du livre).

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