Retour de Campagne (15) – La dame de Chez Lipp – Suite&Fin par Lariègeoise

Retour de Campagne (14)
13 novembre 20

Le jeu « Suite & Fin » récemment proposé ici-même consistait à produire un texte en continuation d’un texte proposé par le JdC et dont le titre était « La dame de Chez Lipp »
Voici la contribution de Lariègeoise. Le texte de départ est imprimé en bleu et le texte de Lariègeoise en noir, tout simplement.

La dame de Chez LIPP

Chez Lipp, dans l’angle Nord-Est de la première salle, juste sous le petit panneau cartonné suspendu à une patère qui « pour la tranquillité de la clientèle, demande aux utilisateurs de téléphones portables de renoncer à s’en servir à table », il y a une femme qui n’y a pas renoncé.

Elle est entrée, seule, brune et pâle, l’oreille collée au petit écran.  Au maitre d’hôtel qui l’a reçue comme une habituée, elle n’a pas adressé un regard. Par un imperceptible mouvement de la tête, elle a refusé les services de la demoiselle du vestiaire et, sans interrompre sa conversation, dans un mouvement compliqué accompli avec la dextérité que seule donne une grande habitude, elle s’est débarrassée de son imperméable. Elle l’a posé sur la banquette, noir, noir comme son sac, comme son tailleur, comme ses chaussures et s’est assise à côté tout en continuant à parler.

On ne l’a pas vue passer commande, mais, quand le garçon lui apporté tout d’abord une corbeille de pain, puis une bouteille d’eau minérale, puis son plat sans doute habituel, elle l’a accueilli d’un sourcil levé réprobateur sans interrompre sa conversation.

Elle n’a pas l’air content, la dame en noir. Les yeux dans le vague, parfois au ciel, elle alterne de brèves périodes d’écoute et de longs soliloques tout en pignochant comme à regret dans son assiette. À intervalles irréguliers, il semble que la communication s’interrompe. Alors, la dame éloigne son téléphone de son oreille, le considère d’un œil incrédule et, le visage devenu plus pâle encore sous la lueur blafarde de l’écran, elle compose un numéro d’un index furieux.

Sur ces mots, la femme en noir se dirigea vers les toilettes et sourit en enlevant sa perruque brune.

Elle retraversa la salle dans l’indifférence générale ; l’écrivain abasourdi recommanda un demi pour se donner une contenance.

Sitôt dans la rue, elle se félicita : ce rôle de garce insolente, elle l’avait joué à merveille ; quel dommage qu’elle ne puisse le faire figurer sur son book.

Peut être y aurait-il une suite,  mais ici elle serait grillée…

Elle reçut illico les compliments du  » bunker « 

Là bas, la Folle de Paris exultait : elle les avait tous bernés, ils la croyaient morte (merci Dr R) le curare avait été bien dosé, et cette intermittente au chômage avait joué les Dati à la perfection….

Quand ils réaliseraient la supercherie, il serait trop tard : le CDGE ( RER express) serait une voie unique d accès à Paris réservée aux vélos, tandis que le périphérique serait réservé à la culture du quinoa.

Les récalcitrants âgés, qui auraient eu la chance d échapper au Covid, ne résisteraient pas à cette vague , peu à peu ils quitteraient Paris ….

Alors elle régnerait sur une foule lobotomisée, uniquement préoccupée du sort des insectes et de la réouverture des bars.

Une réflexion sur « Retour de Campagne (15) – La dame de Chez Lipp – Suite&Fin par Lariègeoise »

  1. Bravo Lariegeoise! Le coup de la perruque, fallait y penser! Et si c’était vrai?

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