¿ TAVUSSA ? (73) – Pourquoi Trump fera un second mandat.

¿ TAVUSSA ? (73) – Pourquoi Trump fera un second mandat.

Le 21/12/2016, 13 jours après l’élection et 2 jours après la confirmation par le Sénat de la victoire de Donald Trump, j’avais écrit le texte que je reproduis ci-dessous. J’étais attristé, scandalisé, ému par ce que je voyais se dessiner et, quand je terminai cet article par ces mots : J’ai peur, j’étais sincère. J’en appelais sans y croire à James Stewart, Gary Cooper et au 5ème de cavalerie.

De bonnes âmes ont tenu très vite à me rassurer : « mais non, mais non, disaient-ils, tu vas voir ! » et ils me parlaient de contre-pouvoirs, et ils disaient que les sénateurs du GOP ne pourraient décemment pas laisser faire « ça » et qu’au besoin, la Constitution et la Cour Suprême seraient là pour contenir les velléités du nouveau président.

Quatre années plus tard, nous sommes à la veille de la nouvelle élection présidentielle, et rien de ce que les optimistes avaient prédit (wishful thinking, sans doute) ne s’est réalisé. Les contre-pouvoirs se sont effondrés d’eux-mêmes, les quelques voix qui se sont élevées en opposition ont été aussitôt licenciées, le Parti Républicain s’est couvert de honte, la Cour Suprême a basculé du côté de l’ombre.

Pendant quelques mois, on a pu croire que le Procureur Mueller pourrait être la réincarnation du James Stewart que j’évoquais dans mon papier de 2016. Hélas, on sait aujourd’hui ce qu’a été son rapport, un chef d’œuvre de subtilités et d’hésitations à la Normande, et ce qu’il a donné, rien. On apprend d’ailleurs aujourd’hui qu’il aurait fait pression sur son équipe pour que les investigations n’aillent pas trop loin.

Mais le pire n’est pas là. Le pire c’est que le pays est aujourd’hui divisé comme il ne l’a jamais été depuis la Guerre de Sécession. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder alternativement CNN et Fox News, il suffit d’entrer dans le domaine obscur et paranoïaque des réseaux sociaux avec Qanon en première ligne, il suffit de voir les images des manifestations, notamment celles où l’on voit un gamin blanc de 17 ans passer sans encombre à travers les lignes de la police en brandissant un AK47 avec lequel il vient de tuer deux manifestants. L’Amérique est aujourd’hui profondément divisée et ce n’est pas la victoire de l’un ou de l’autre des candidats qui va la rassembler.

A ce stade de cet article, vous avez peut-être senti que je n’étais pas vraiment optimiste sur les résultats des prochaines élections américaines.  Effectivement, depuis quelques jours, je pense que Trump va faire un second mandat. Mais pourquoi cela, me direz-vous, alors que les sondages donnent une avance raisonnable à Biden et qu’une majorité sensible d’électeurs veut donner sa voix au Parti Démocrate ? Mais parce que, vous dirai-je, et cela me parait simple, le prochain président ne sera pas désigné par les électeurs. Il le sera par des juges, et probablement ceux de la Cour Suprême. En effet, à moins d’une forte vague en faveur de l’un ou de l’autre candidat, forte vague que l’on peut déjà exclure des possibilités, le résultat, quel qu’il soit, sera contesté par l’un ou par l’autre des candidats, peut-être même par les deux. A partir de là, le sort de l’élection sera remis dans les mains des juges. Autant dire qu’il en sera jeté, le sort : en moins de quatre ans, Trump a nommé lui-même plus de juges (200) qu’aucun autre président, et l’on sait aussi ce qu’est devenue la Cour Suprême aujourd’hui.

Mais le pire du pire n’est pas là. Heureusement, le pire du pire n’est pas toujours sûr. Le pire du pire, ce serait, à la suite d’une défaite de Trump, un Coup d’État, ou pourquoi pas une guerre civile. Un Coup d’État ? Probablement législatif avec un Président en exercice qui ira chercher dans la Constitution, dans la jurisprudence, dans la mauvaise foi ou même dans la cuvette des toilettes tout un tas de bonnes raisons de ne pas quitter la Maison Blanche. Une guerre civile ? Pourquoi pas ? La division est là, les armes sont là, la tradition de violence aussi.

Prions, mes frères.

Vous n’êtes probablement pas de ceux qui disent : « Oui, c’est grave, ce qui se passe. Mais après tout, ça ne nous concerne pas directement. L’Amérique, c’est loin. »

Vous êtes plutôt de ceux qui pensent que l’Amérique, c’est peut-être loin, mais que l’Amérique, nous en dépendons sacrément, et que l’Amérique, c’est nous dans dix ans, peut-être cinq.

Alors prions, mes frères.

Une heure après avoir publié cet article, voici ce que je lis dans Le Figaro de ce matin : « 
Le président américain a refusé mercredi de s’engager à un transfert pacifique du pouvoir en cas de défaite à l’élection du 3 novembre, s’attirant les réactions outrées de son adversaire démocrate et jusque dans son propre camp. «Il va falloir que nous voyions ce qui se passe», a déclaré Donald Trump lors d’une conférence de presse à la Maison Blanche. Il avait été interrogé par un journaliste qui lui demandait de prendre l’engagement d’assurer un transfert sans violence du pouvoir quel que soit le résultat de l’élection qui l’oppose au démocrate Joe Biden
. »
C’est rassurant, non ?

Et voici le texte paru le 21/12/2016

Une vue de l’Amérique

 Je suis un enfant de la guerre.

Et nous autres, enfants de la guerre, nous avons été nourris, au propre comme au figuré, au lait concentré sucré de l’Amérique. Nous avons grandi en force et raison grâce aux Candy Bars Hershey’s pour la bonne énergie, au chewing-gums Wrigley’s pour la mâchoire carrée et au Coca Cola pour la soif d’aujourd’hui. Mais aussi grâce à John Steinbeck et à Franck Capra pour la justice sociale, à Gary Cooper et John Ford pour le courage, à Howard Hawks et John Wayne pour le patriotisme, Fred Astair et Ginger Rogers pour l’élégance, Stanley Donen et Katharine Hepburn pour la sophistication… Nous avons grandi en regardant l’Amérique.

Et puis, il y a eu Kennedy à Dallas, Johnson à Washington, les boys au Viêt-Nam, Nixon au Watergate… Mais c’était des accidents, des erreurs, des enchainements, des fatalités. Rien de cela ne changeait l’Amérique, qui survivait, se redressait, faisait justice. Il y aurait toujours un James Stewart pour convaincre un Sénat, un Robert Redford pour faire éclater une vérité, un Steve McQueen pour sauver un enfant de l’incendie. Il y aurait d’autres Sidney Lumet pour exposer, de nouveaux Oliver Stone pour dénoncer et d’éternels Woody Allen pour s’en moquer. L’Amérique resterait l’Amérique.

Bien sûr, il y a eu le 11 septembre, et puis Georges Bush Junior, et puis les armes introuvables de destruction massive, et puis, et puis… mais l’Amérique est revenue, une fois de plus, conforme à ce qu’on attendait, un dessin de Norman Rockwell…

Et puis il y a eu le Donald, et le Donald a dit tout ce que nous ne voulions pas savoir de l’Amérique : la brutalité, le cynisme, la violence, la bêtise, la vulgarité, l’égoïsme, l’amoralité, l’immoralité, le mépris, la peur, l’ignorance… tout ce que nous ne voulions pas entendre mais que nous avons entendu.

Alors, nous nous sommes dits que le Donald était un clown mal coiffé, vulgaire et pathétique dans sa naïveté de nouveau riche auto-ébloui, dans son costume d’oncle Picsou rancunier et vaniteux, qu’il n’irait pas bien loin, englué qu’il serait de ridicule sous les parodies des comédiens satisfaits d’Hollywood et des chroniqueurs malins de Broadway, moralement détruit par les belles envolées des discours de Monsieur et de Madame Obama, annihilé, explosé et piétiné par tout ce qui sait lire et écrire dans les cinquante états. Nous étions confiants, l’Amérique ne ferait pas ça.

Et puis l’Amérique l’a fait ! De manière confuse, contestable, contestée, mais elle l’a fait.

L’Amérique n’est-elle plus l’Amérique ?

Is this really happening ?

Où êtes-vous, James Stewart et Robert Redford ?

Qu’est-ce que vous fichez, Gary Cooper, John Wayne et Steve McQueen ?

Qu’est-ce que vous attendez, le 5ème de cavalerie ?

J’ai peur.

 

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