Paris ! À nous deux ! (2)

Couleur café n°38

Les Deux Palais
3 Boulevard du Palais

Vieil et grand établissement classique de Paris, situé dans l’île de la Cité, entre l’ancien Palais de Justice et la Préfecture de Police. Je me demande quel est ou quel était ce deuxième palais qui vaut son enseigne à cette brasserie. Sans doute le Palais de la Cité, autrefois résidence des rois de France.
Pourquoi suis-là ? En général, je ne fais que passer dans cette triste artère qui rejoint le Pont Saint Michel au Pont au Change. Mais aujourd’hui, j’ai pris le bus 21 car je comptais me rendre du côté du Palais Royal. A cette heure de faible circulation, dix heures du matin, le bus a dévalé le boulevard Saint Michel et traversé le pont sans encombre. Tout allait bien, jusqu’à ce qu’il vienne buter sur le feu rouge de la rue de Lutèce. Là, chacun pouvait constater à nouveau la complète réussite de la politique éclairée et volontariste de Notre Drame de Paris, politique qui consiste à décourager les automobilistes, favoriser chaque jour davantage la circulation des vélos, fut-ce au détriment de la sécurité des piétons et de la circulation des transports en commun. Je sais que de ça, j’ai déjà beaucoup parlé, mais que voulez-vous, chaque jour passé à Paris, ça me mets en fureur.
Abandonnant l’idée du Louvre, j’ai supplié le wattman de me laisser descendre, ce qu’il accepta de faire — il y a du relâchement dans l’application du règlement de la RATP. J’étais devant les Deux Palais. Que vouliez-vous que je fis contre cet acharnement du sort à me placer dans de telles situations de proximité avec les bistrots ? J’entrai.

Et voilà comment Madame Hidalgo par pure idéologie anti-bagnole pousse au crime, à la débauche, à l’alcoolisme et, ce qui est pire, à la mauvaise foi.

 

La Belle Ferronnière
Rue François 1er

Décidément, je m’enhardis. Me voilà dans le 8ème, maintenant ! Au cœur du 8ème, en plein milieu de la rue François 1er, en face de Cartier, de John Lobb, de l’hôtel Chateau Frontenac, pas loin de Chaumet, de Dolce Gabanna et de tout ce que le monde entier vient chercher à Paris.
Moi, je suis venu chercher l’exotisme, celui des people, des héros des magazines, des vedettes des talk show, des stars de la télévision. Il y en a marre des éditeurs du Quartier de l’Odéon et des agrégés de philo du Quartier Latin.
Et je l’ai trouvé, l’exotisme ! Seulement quarante minutes de bus, une correspondance, un contrôle inopiné — faites attention, ils sont en civil, maintenant, T-shirt crasseux et sac à dos, on dirait des fraudeurs — et me voilà à la Belle Ferronnière, en plein dans la vraie vie. La preuve : Cyril Hanouna est là, finissant de déjeuner, au soleil sur la terrasse éphémère où je viens de m’installer. Au moins, Je n’aurais pas fait le voyage pour rien. Deux gros trentenaires en jean et T-shirts de deux tailles trop petits non plus d’ailleurs. Repérant celui que Charlie Hebdo appelle le virus qui rend con, ils ont brusquement arrêté leur Opel Vectra en double file devant la terrasse. Maintenant, Ils s’approchent timidement, avec tout le respect que l’on doit à une telle concentration de vulgarité, et lui demandent un selfie. Hanouna s’exécute de bonne grâce — il aurait dit « de bonne graisse » — et les deux ploucs repartent contents. Ils en ont pour des années à digérer l’événement.
Maintenant que j’ai libéré ma bile et ravalé ma jalousie envers un type qui gagne en une semaine ce que le serveur qui vient de lui apporter sa note gagne en trois ans et le chauffeur du taxi qui passe en dix, je me lève et je m’en vais car je n’ai plus rien à faire ici. Cyril non plus d’ailleurs, car il s’en va sur un tout petit vélo massif, bleu électrique et électrique.

Je n’ai rien d’autre à dire sur la Belle Ferronnière. Heureusement qu’il était là, Hanouna.

3 réflexions sur « Paris ! À nous deux ! (2) »

  1. Malheureusement, la description de la rue de Vaugirard par Bruno est absolument exacte. J’y passais hier et je n’en croyais pas mes yeux. Sommes-nous encore capables d’émigrer ? à nos âges ? et en vélo ? On tourne en rond à répéter tous la même chose : la connerie n’aurait-elle donc plus de limites ? Ce qui me choque, ce n’est pas l’aveuglement dogmatique de la drame qui n’est pas son apanage, ce sont les conséquences, non pas sur nous retraités désœuvrés, mais sur ceux qui sont obligés de recourir à la voiture parce qu’ils ont besoin de travailler, de nourrir leur famille et, indirectement, en faisant marcher l’économie de notre pays. J’en déduis que madame Hidalgo a décidé de détruire notre économie déjà malmenée et donc l’avenir de nos enfants. Je pense sincèrement qu’on n’est pas très loin du crime contre l’humanité passible du Tribunal de La Haye. J’en pleurerais.

  2. Arrêté et non atterré, mais sans doute avais-je en tête mon deuxième sujet !

  3. À propos des « Deux palais » : je m’y suis souvent atterré pour un jambon beurre vichy avant une plaidoirie, ou un demi après. J’ai toujours pensé qu’il devait son nom au fait qu’il se trouvait entre le palais de justice proprement dit et le palais du tribunal de commerce qui lui fait face. Mais peut-être me suis-je, par manque de curiosité exigeante, trop facilement contenté d’une explication fausse.
    Quant aux exploits de Notre Drame, je t’invite, cher Philippe, à nous rendre visite et à contempler le nouveau visage de la rue de Vaugirard entre Rennes et Montparnasse : la chaussée, certes nouvellement revêtue, est désormais coupée en trois dans le sens de la largeur : plus rien pour le stationnement, plus rien pour les arrêts (taxis et VTC ne peuvent plus embarquer ou débarquer les personnes âgées et celles-ci ne peuvent plus décharger leurs voitures) plus rien pour les livraisons, deux tiers de la voie (une par sens) pour les vélos et trottinettes et un seul pour les automobiles, le tout balisé par un traçage au sol et des plots serrés d’un jaune plus jaune que celui des cocus que nous sommes.
    À se demander s’il ne faut pas quitter Paris !

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