Les Valseuses

Les Valseuses
Bertrand Blier – Roman -1972

Avant d’être un film, le film à succès de 1974, Les Valseuses, c’était un roman, probablement le premier, peut-être le seul roman de Bertrand Blier. Paru en 1972, je ne sais plus s’il avait eu du succès, mais moi, je sais qu’à moi, il avait flanqué une sacrée claque.  Liberté complète de langage, affranchissement total des codes de la morale qu’elle soit bourgeoise, ouvrière ou féministe, absence de référence à quoi que ce soit de connu (sauf à Céline, peut-être), pas un cliché, pas une fadaise, pas une formule toute faite, rien que de l’original.

 Voici les premières lignes :

On est des cons.
On a commencé par piquer une bagnole, comme ça, juste histoire de faire un tour, parce qu’on savait pas quoi faire. Le samedi on sait jamais quoi faire. Le dimanche non plus d’ailleurs. Le cinéma ça nous emmerde, les filles sont connes et puis faut du blé, et on n’en a pas. Une 21 à injection, toute neuve, est garée dans une rue déserte : on pouvait pas laisser passer ça : le moteur était encore tiède.
Une 21 à injection, toute neuve, et garée dans une rue déserte : on pouvait pas laisser passer ça. Et plutôt pute, comme berline. Je pose la main sur le capot : le moteur était encore tiède. (…)

Et maintenant les dernières lignes. La DS21 où Pierrot, Jean-Claude, Jeanne et Marie-Ange  filaient heureux vers on ne sait pas trop quoi vient de s’écraser contre un platane :

(…) Ils me passent, un par un, les clichés : je me découvre arqué, entre les cuisses de Jeanne, et j’avoue que

c’est pas beau. Je vois mon cul dans une chambre de palace, à côté d’une femme morte, et j’avoue que c’est pas beau. Je vois Marie qui expire, au milieu des pâquerettes, et j’avoue que c’est pas beau. Je vois la tête de Pierrot, sur un plastron de boucher, et j’avoue que c’est pas beau.
La vie est trop compliquée. J’ai beau chercher, je vois rien de simple. On croit bien faire, et c’est la merde. Toujours la merde.
Rassurez-vous, messieurs les coiffeurs ! on vous débarrasse le plancher !
La quille !
MARIE-ANGE : Pierrot ! Jean-Claude ! Qu’est-ce qui m’arrive ? J’ai des excréments plein la bouche !

Voilà. « Ne pas lire Les Valseuses, avait écrit Yvan Audouard dans le Canard Enchainé, c’est une connerie pure et simple ! »

Le film, sorti deux ans plus tard, ne trahissait en rien le roman, et pour cause, c’est Bertrand Blier qui l’a fait, lançant les carrières de Miou-Miou, Gérard Depardieu et Patrick Dewaere en même temps que la sienne. Les Valseuses furent très mal accueillies par la critique et formidablement par le public. En ce XXIème siècles de lumière monochrome, la sortie d’un tel film, dont on peut douter qu’elle soit seulement envisagée, provoquerait des protestations, des pressions, des aversions, des manifestations, des exaspérations, des processions et des agressions en tout genre… Quel progrès en 46 ans !

Et si vous voulez voir une vraie scène de campagne, cliquez sur le lien suivant :

https://www.dailymotion.com/video/x5xkcv

Les cinéphiles remarqueront peut-être que cette scène bucolique n’est pas extraite des Valseuses mais de Buffet Froid. Mais on s’en fout, c’est pareil.

 

Une réflexion sur « Les Valseuses »

  1. Un roman choquant, un film grossier, des acteurs vulgaires …
    Un vrai régal.

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