Journal de Campagne (55)

Journal de Campagne (55)
Samedi 9  mai 2020 – 16h47

L’avantage de cette période de confinement, en dehors de ne voir personne, c’est de donner le temps de faire des choses qu’on n’aurait pas faites sans cela.

Réorganiser la bibliothèque,
la ranger par thème, par auteur, par éditeur, par ordre alphabétique, par taille ou par couleur, enfin autrement que dans ce sacré bordel. S’il pleut demain, je m’y mettrai. Probablement.

Ranger le garage,
le vider de toutes ces choses inutiles qui l’encombrent, des trucs qui peuvent toujours servir mais qui ne serviront jamais : des cartons ayant contenu un jour des bouteilles de Brouilly, du champagne ou un appareil ménager, des bidons de plastique qui garde encore l’odeur d’un white-spirit ou d’un liquide lave-glace d’autrefois, des bouts de tissu, des chutes moquette ou de bois ou d’autres métaux, des vieux vêtements à mettre pour repeindre un banc… Ranger le garage…  Non, ça, c’est trop décourageant. L’année prochaine, peut-être.

Revoir un vieux film,
ça, c’est une idée : revoir de bons vieux films. On peut commencer par voir des vieux films qu’on n’aurait pas vus avant. Par exemple, « Mon oncle d’Amérique », le film d’Alain Resnais dont je dirai tout le bien que je pense dans une Critique aisée bientôt programmée. Mais le mieux, c’est quand même de revoir de vieux films. Pour éviter les déceptions, il vaut mieux choisir de vieux films qu’on a un jour aimés. Alors, c’est ce que j’ai fait avec « Vivement dimanche », le dernier film de François Truffaut. Je suis un admirateur de Truffaut, pas de tout Truffaut, mais d’une bonne partie de Truffaut quand même. J’avais bien aimé Vivement dimanche en 1983. Je me souvenais du charme de Fanny Ardent, de la légèreté de la comédie, du pastiche du film policier.

Mercredi, j’ai revu Vivement dimanche. Enfin, disons que j’en ai revu les trois premiers quarts pour m’endormir sur le dernier. Je ne pense pas que ce soit du fait du petit écran du mini iPad sur lequel je l’ai regardé. Le film n’a pas nécessité de très gros moyens et les scènes grandioses de tempêtes, d’éruptions volcaniques ou de combats aériens y sont fort peu nombreuses. Il était donc fait pour s’adapter à ce petit écran.

Si, cette fois, je n’ai pas aimé Vivement dimanche, je crois que c’est parce que j’ai découvert ce qu’il était véritablement : une pochade, un film d’amateurs, tourné à la va vite pendant un long week-end par une bande de copains à peine doués, pour passer le temps, pour s’amuser, entre eux. Et quand on ne fait pas partie de la bande, on ne tarde pas à s’ennuyer.

On peut bien sûr penser que le coté caricatural et l’absence d’intérêt de l’histoire sont voulus, mais ça ne soulage en rien l’ennui qui vous prend. Les dialogues arrivent à manquer de naturel tout en ayant l’air improvisés, ce qui est un comble. Mais le pire, c’est le jeu des acteurs : Trintignant, incapable de jouer dans une comédie, qui garde son air figé et emprunté habituel comme s’il jouait dans un film de Truffaut, et Fanny Ardent, très joliment photographiée, qui fait un temps illusion par sa légèreté et sa vivacité mais dont la gestuelle affectée (il faut la voir courir) montre vite qu’elle ne sort pas de l’Actor’s Studio. Les autres comédiens sont inexistants, une troupe d’amateurs à qui on a bien dit qu’ils allaient jouer un pastiche.

J’ai téléchargé « l’Année dernière à Marienbad », mais je crois que je vais plutôt regarder une saison de Big Bang Theory, ou alors ranger le garage.

6 réflexions sur « Journal de Campagne (55) »

  1. J’ai été un inconditionnel de Truffaut quand j’avais dix-huit ans. Non pas parce qu’il incarnait la nouvelle vague, mais parce qu’il y avait une poésie incroyable dans ses premiers films et en particulier dans la série des Antoine Doisnel. Récemment, j’ai lu quelques unes de ses critiques des années cinquante parues dans les Cahiers du Cinéma … Je ne supporte pas la méchanceté, c’est à mon sens pire qu’un défaut, c’est une honte. Or, les écrits de Truffaut sont et ne sont que méchants. Lamentablement méchants. J’aurais pu lui pardonner (quoi que ce ne soit pas certain) s’il n’avait pas commis à la fin de sa vie le pire des navets qui est la stricte copie des films qu’il avait pourtant dénoncés auparavant. Je veux parler du Dernier Métro ….

  2. Le film sorti en 83, lui décédé en 84 d une tumeur au cerveau.
    Ceci explique peut être cela….

  3. Il est possible que certains d’entre nous vieillissent mal. De la même manière, certains films aussi vieillissent mal.
    Mais on peut revoir sans problème, et c’est même à recommander en ces temps de confinement,
    Autopsie d’un meurtre 1959
    La prisonnière du désert 1956
    Chinatown 1974
    La règle du jeu 1939
    Certains l’aiment chaud 1959
    La Garçonnière 1960
    Nous nous sommes tant aimés 1974
    Les Affranchis 1990
    Les choses de la vie 1970
    et des dizaines d’autres sans trouver qu’ils ont mal vieilli.
    C’est peut-être parce que ce sont des films qui ont été vraiment travaillés, tant par les scénaristes que par les réalisateurs et les acteurs et non des petites choses bâclées comme Vivement dimanche, et vendues à l’Avance sur recettes et aux spectateurs sur le seul nom d’un acteur ou d’un réalisateur.

  4. Je ne sais pas si ce sont les films qui vieillissent mal ou nous ?
    (je sais que je me répète, mais après deux mois de confinement, j’ai des excuses)

  5. Truffaut et Fanny Ardant, je les croisais souvent dans mon quartier: Lumir leur fille etait en maternelle avec ma plus jeune fille.
    Je n avais pas vu ce dernier film , aucun argument à t opposer ; je te trouve bien sévère néanmoins: tu aurais peut être dû revoir les 55 jours de Pékin plus en phase avec la durée de ton confinement.
    Si Mr Minette existe toujours, un petit tour dans ton garage devrait le ravir et lui permettre de renouveler son décor.
    En revanche, les bouts de tissu à garder pour faire des masques.
    La souris peu inspiree mais qui ne lâchera rien… comme disaient les sportifs franchouillards quand justement ils allaient perdre.

  6. Ah la la mon Philippe … Tu as manqué d’intuition. Il y avait pourtant un signal qui aurait dû t’alerter. Ce film porte le même titre qu’une émission de l’infâme Drucker qui pollue la tête des français depuis plus de 50 ans avec sa mièvrerie, son hypocrisie et sa gentillesse affectée qui cache mal sa profonde médiocrité.

    La prochaine fois, tu te méfieras davantage. Ou tu me demandes.

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