Journal de Campagne (48)

Journal de Campagne (48)
Samedi 2 mai 2020 – 16h47

Il y a trois jours, j’ai déposé mon épouse devant le supermarché Leclerc de Montmirail (3643 habitants en 2015), puis je suis retourné au centre de la ville, où j’ai garé ma voiture. J’avais besoin d’argent liquide, de timbres et de produits homéopathiques. J’obtins tout cela en moins de 8 minutes et de 60 mètres dans des conditions de sécurité à mon avis parfaites. Je connais à peu près le temps qu’il faut de nos jours pour remplir un caddie. J’avais donc du temps devant moi et je me suis dit tout naturellement : « Tiens, il est 9 heures ! C’est le moment d’aller prendre un petit noir sur le zinc ! » J’avais parfaitement conscience de l’endroit où je me trouvais et je savais que les deux cafés sur la place étaient aussi tristes et froids l’un que l’autre (salle Formica sonore, grand écran de télévision à video-clips au fond, deux clients et demi, expresso Lavazza lavasse et tiède), mais quand tu es à Montmirail, tu fais comme font les Montmiraillais, et tu vas au café de Montmirail. Le café de la place étant fermé, j’ai entrepris de descendre la rue commerçante ( !) pour rejoindre l’autre bistrot. Fermé également. C’est alors que je remarquai que tous les commerces que je venais de longer étaient fermés. Et là, vous vous dites : « Eh ! Oh ! Coutheillas ! C’est normal, c’est confinement ! » Bien sûr que c’était normal, mais moi, un instant, j’avais oublié. Malgré mon masque sur le nez, malgré le silence gris des rues désertées, j’avais oublié.

Et j’ai pensé aux rues de Paris, à tous ces commerces et surtout à tous ces cafés et ces restaurants fermés. Et bien que la ville me manque un peu plus chaque jour, je crois que je préfère ne pas voir la Rue Soufflot, le carrefour Danton ou la place Saint-Germain des Prés sans terrasses, sans lumières, sans embouteillage, sans personne.

Je crois que je vais attendre encore un peu.

 

Une réflexion sur « Journal de Campagne (48) »

  1. 9h… l heure à laquelle, je repoussé mon plateau et entame la lecture de la presse : JDC , libe, Le Parisien , Le Figaro , parfois meme la Croix….Meme en recoupant les informations, la tonalité est la meme: les critiques à l égard du gouvernement prennent des teintes différentes: mais le dilemme reste entier : comment allons nous sortir de nos tanières…
    Donc 9 h sur la place de Montmirail, meme dans la vie d avant, elle ne doit guère être animée cette place que je connais bien….
    Moi aujourd hui, j ai brave un interdit: ayant marre de ressembler à une ourse des Pyrénées, je suis allée chez mon coiffeur : entrée discrète, ambiance tamisée, chuchotements , lui masqué, mon enveloppe de billets prête, j ai eu l impression de tourner une séquence pour un film sous l occupation..
    Et ça ressemble de plus en plus à ça PAris : visiblement ça  » résiste »: le fleuriste a vendu du muguet en douce, dans le 9 eme, les restaurants font traiteur, dixit ma fille, j ai aperçu une petite librairie entrouverte…
    Certes elle ne vend que des BD …mais le jeune public etait la.
    La folle en profite pour réserver la Rue de Rivoli aux vélos.
    Bref ça bouge comme on dit dans les films policiers….
    Alors le 11 Mai ça risque d être un beau bordel ici…
    Restez chez vous les exilés….

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