Une brève histoire de l’homme

Dans ce passage du dernier roman de Ian McEwan, le narrateur réfléchit sur l’avenir de l’homme à l’heure de l’émergence de l’Intelligence Artificielle.  À l’heure ou je relis ce texte avant de le publier, moi qui viens d’achever la lecture des « Particules élémentaires » et qui vous en ai parlé samedi dernier, je me demande si, pour la concision dans la description du déclin de l’homme, McEwan n’a pas lu Houellebecq. 

(…) Je m’installai dans la cuisine, dans un vieux fauteuil de cuir, un ballon de vin blanc moldave à la main. Il y avait un plaisir intense à poursuivre une réflexion sans être contredit. Je n’étais sûrement pas le premier à le penser, mais on pouvait envisager l’histoire de l’estime de soi chez les humains comme une série de de déclassements conduisant à l’extinction. A une époque, nous trônions au centre de l’Univers, avec le Soleil, les planètes et le monde observable qui tournait autour de nous en une danse rituelle et intemporelle. Puis, défiant les prêtres, une astronomie sans pitié nous avait réduits à n’être qu’une planète en orbite autour du Soleil, une parmi tant d’autres. Et pourtant nous restions à part, uniques et géniaux, choisis par le Créateur pour régner en maître sur tout ce qui vivait. Ensuite, la biologie avait confirmé que nous ne formions qu’un avec le reste, partageant une origine commune avec les bactéries, les truites et les moutons. Le début du vingtième siècle marqua un exil encore plus profond dans les ténèbres lorsque l’immensité de l’Univers fut révélée, et que le Soleil même devint un parmi les  milliards que comptait notre galaxie, elle-même une parmi des milliards de galaxies. Enfin, en notre for intérieur – notre dernier refuge – nous avions sans doute raison de croire que notre conscience était plus développée que celle de toute autre créature sur terre. Or l’esprit humain qui s’était un jour rebellé contre les dieux s’apprêtait à se détrôner lui-même grâce à ses fabuleuses capacités intellectuelles. En bref, nous concevions une machine un peu plus intelligente que nous, puis nous m’a programmions pour qu’elle en invente une autre qui dépasserait notre compréhension. À quoi servirions-nous alors ?
Des pensées de si haute volée méritaient un deuxième ballon de vin, plus rempli, et je me resservis. (…)

Ian McEwan – Une machine comme moi.
Gallimard – 2020

 

4 réflexions sur « Une brève histoire de l’homme »

  1. Tu vois juste chère Lady Lariegeoise,
    Les masques tombent comme les feuilles mortes
    Emportées par le vent du nord
    Les souvenirs et les regrets aussi
    Et ne m’en veut pas si je te tutoie
    Je dis tu à tous ceux que j’aime
    Même si je ne les ai vus qu’une seule fois
    La vie est brève, trop brève.

  2. Les masques tombent , si je puis dire
    -nous avons un correcteur d orthographe, qui débusque la un S la un E; ou alors c est un jeu et nous devons trouver un mot cache au bout du numéro 75 duJDC
    -ce club sélect me plait de plus en plus eT au lieu de couper les cheveux en quatre ( plût au ciel que les miens le fussent), ses membres nous livrent enfin des confidences: whisky, beaujolais; ici c est champagne Sonette que Philippe eT Sophie connaissent bien.
    -Notre Maître qui nous à attires en ces parages pour sa prose féconde et imaginative, nous livre des analyses politiques tout à fait judicieuses : déjà qu il a été repéré au masque eT la plume, pourvu que Le Figaro ou l Opinion ne nous l enlevé pas.
    -le morceau choisi de ce matin résume bien la situation : on est bien peu de chose….

  3. Je partage l’indignation de Paddy, ses goûts aussi en matière de bon scotch, mais pas son orthographe: c’est Chivas Regal et pas Rigal!
    J’en profite pour raconter une petite histoire qui m’est arrivée il y a quelques années sur un vol Lufthansa entre New York et Frankfort. Dès le décollage, je remarquais que l’autre côté de l’allée centrale, étaient assis une jeune femme côté hublot et à sa droite un homme, plutôt fort, complètement ivre. Au moment du dîner, je constatais que l’homme, qui avait avalé quelques whiskys de plus, importunait sans se gêner la pauvre femme, picorant ce qui se trouvait dans son assiette. La pauvre ne savait que faire. J’alertais l’hôtesse qui me répondit qu’elle avait remarqué l’intrus et qu’elle avait la situation en main. Je remarquais un peu surpris qu’elle satisfaisais toute nouvelle demande de boisson qu’il faisait, mais il finit par s’endormir probablement dans un état comateux. Plus tard, l’hôtesse me dit que l’avion était plein et ne pouvant pas déplacer l’odieux passager, elle avait encouragé ce comas à venir. Le lendemain à Frankfort, en correspondance pour un autre vol, je revis le personnage, complètement perdu, errant sans savoir ou aller. L’esprit de decision dont à fait preuve le préfet m’a rappelé celui de cette hôtesse (qui n’était d’ailleurs pas à l’image fantasmatique que bien des hommes ont, Dieu le leur pardonnera, des hôtesses de l’air).

  4. Nous sommes bien peu de choses!
    Ian McEwan se ressert un verre de vin moldave pour réfléchir à l’avenir de l’homme. Moi, hier soir, j’aurais bien voulu me livrer à la même réflexion, comme tous les soirs depuis très longtemps avec un verre de Chivas Rigal, mais non, parce que hier après midi après avoir bravé le coronavirus et ses propagateurs pour aller au Super U local en racheter un flacon plein, arrivé devant le stand des alcools dits « forts », celui-ci était condamné avec la copie d’un arrêté du préfet du Morbihan, l’honorable Patrice Faure, annonçant l’interdiction de la vente de ces alcools, mais pas celle des vins, apparemment pour éviter la violence générée aux confins de la civilisation bretonne. C’est pas de la discrimination anticonstitutionnelle ça? Les buveurs de gros rouge sont-ils statistiquement moins violents vis-à-vis de leurs compagnes ou de leurs enfants que les buveurs de whisky? Bizarre tout ça! car je remarque que le rayon des alcools forts de mon Super U est presqu’exclusivement composé d’alcools importés, whiskys, bourbons, gins, etc… on ne nous dit pas tout!

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