C’est vrai, ça à la fin ! (2)

(…) C’est à ce moment que la pensée de la mort fit irruption dans ma vie quotidienne. Je mesurais les années qui me séparaient de ma fin. Je cherchais des exemples d’hommes de mon âge qui fussent déjà morts. Et j’étais tourmenté par l’idée que je n’aurais pas le temps d’accomplir ma tâche. Quelle tâche ? Je n’en savais rien. À franchement parler, ce que je faisais valait-il la peine d’être continué ? Mais ce n’était pas exactement cela. Une crainte ridicule me poursuivait, en effet : on ne pouvait mourir sans avoir avoué tous ses mensonges. Non pas à Dieu, ni à un de ses représentants, j’étais au-dessus de ça, vous le pensez bien. Non, il s’agissait de l’avouer aux hommes, à un ami, ou à une femme aimée, par exemple. Autrement, et n’y eût-il qu’un seul mensonge de caché dans une vie, la mort le rendait définitif. (…)

Albert Camus – La chute

ET DEMAIN, APRES LA CHUTE, LES SQUELETTES

Une réflexion sur « C’est vrai, ça à la fin ! (2) »

  1. Mais qui donc peut se vanter de mourir, débarbouillé de tous ses mensonges ? C’est beaucoup exiger d’un être humain.

    Ce qui est vrai en revanche, c’est que d’avoir échappé d’un cheveu à la mort vous fait tout reconsidérer.

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