Archives mensuelles : février 2017

Incident de frontière – Chapitre 10

Tous les chapitres précédents sont là . Il suffit de cliquer dessus :

 Chapitre 1     Chapitre 2     Chapitre 3      Chapitre 4    Chapitre 5   Chapitre 6     Chapitre 7     Chapitre 8      Chapitre 9

Résumé des 9 chapitres précédents :
Nous sommes à la fin du long weekend de mai 1970 de nos neuf voyageurs. Voici quelle est la situation :
Les deux breaks Peugeot 207 ont été bloquées au poste frontière d’Addabousiyah, et deux de leurs occupantes, des jeunes femmes américaines, soupçonnées d’espionnage pour avoir photographié le poste frontière et une jeep de l’armée, ont passé plus d’une heure prisonnières des soldats syriens. Elles viennent d’être libérées, mais on ne sait pas ce qui a bien pu se passer dans le poste militaire. On craint le pire.

Chapitre 10

La nuit était tombée. Les occupants de la première voiture mouraient d’impatience de savoir ce qui s’était passé, car Anne et Patricia étaient montées précipitamment dans celle de Christian sans avoir le temps de rien expliquer. Tout en conduisant, Jean-Pierre pensait qu’il n’aurait pas été prudent de s’arrêter en rase campagne pour discuter de tout ça. Ce n’est pas que la campagne libanaise ne soit pas sure, mais avec ce qu’ils avaient appris par Radio Hamra, il valait mieux mettre quelques kilomètres de plus entre eux et la frontière syrienne. Ils avaient eu assez d’ennuis comme ça. Le mieux serait de s’arrêter dans un des cafés de bord de mer à Tripoli. Ils y seraient plus en sécurité. Il accéléra et tenta de se concentrer sur la conduite.

C’est Bill qui parla le premier. Il se pencha entre les deux sièges avant et toucha légèrement l’épaule du conducteur.

– Que pensez-vous qu’ils ont fait à elles ? dit-il en français.

Comme tous les autres, Jean-Pierre ne pensait qu’au pire, à ça, au viol, mais il n’était pas question de l’avouer.

– Sais pas, répondit Jean-Pierre, crispé.

– Elles n’avaient pas l’air mal en point, dit Françoise qui cherchait autant à se rassurer elle-même qu’à rassurer les autres.

– Avec ces sauvages, on ne sait jamais ! Mon dieu, quel pays ! Et il parait qu’en Arabie Saoudite, c’est Continuer la lecture de Incident de frontière – Chapitre 10

Tignes le Lac

Vous souvenez-vous, mes amis,
Aujourd’hui devenus bien vieux,
Quand nous allions faire du ski,
O combien c’était merveilleux.

Nous partions de très bon matin,
C’est à dire vers neuf heures et demie
Tandis que je rongeais mon frein
A attendre ce bon vieux Jean-Louis.

Je dressais le programme du jour.
Jean-Louis finissait son loto.
Patrick et François, pleins d’humour,
M’app’laient aussitôt Bénito.

C’était bien souvent vers la Daille
Que se dirigeaient nos spatules
Et très tôt nous faisions ripaille
Sans avoir peur du ridicule.

La Grande Motte, le Fornet, Tommeuses,
Nous voyaient toute la journée
Sans parler de toutes ces skieuses
Qui, muettes, nous admiraient.

 

Le soir, autour de la table,
Courbatus, fatigués, contents,
Nous jouions, c’était remarquable,
Au truc qui monte et qui descend.

Ne vous y trompez pas, infâmes!
Car ce jeu était innocent.
Il n’impliquait aucune femme,
Mais des cartes et très peu d’argent.

Ne regrettons rien, c’est fini,
Mais comprenez-vous à présent
Que nous vivions de notre vie
Parmi les meilleurs moments ?

 

Being a woman

Voici les (presque) dernières répliques de Bette Davies dans un de mes films préférés du cinéma américain, ALL ABOUT EVE. C’est probablement aussi le meilleur film qu’on puisse trouver sur le sujet du théâtre et du métier d’acteur.
Si vous avez oublié le sujet de All about Eve, allez donc relire ma Critique aisée n°59, dont voici le lien :
https://leblogdescoutheillas.com/?p=4196
Cette tirade que je vous propose n’est pas vraiment dans l’air du temps, pas vraiment féministe, et elle risque d’attirer au JdC quelques commentaires acides ou furibards. Eh bien, tant pis. Considérez seulement qu’on est en 195O, que c’est Mankiewicz qui écrit et qui dirige, que c’est Margo Channing, la plus grande actrice de Broadway du moment, qui parle, et qu’elle est interprétée par Bette Davies, la plus grande actrice d’Hollywood du moment.

« So many people know me !… I wish I did.  I wish someone would tell me about me…
Besides something spelled out in light bulbs, I mean.
Besides something called the temperament, which consists mostly of swooping about on a broomstick, screaming at the top of my voice.
Infants behave the way I do, you know. They carry on and misbehave -they’d get drunk if they knew how-  when they can’t have what they want, when they feel unwanted, or insecure, or unloved.Bette Davies as Eve
More than anything in this world, I love Bill, and I want Bill. I want him to want me, but me, not Margo Channing. And if I can’t tell them apart, how can he?
About Eve, I’ve acted pretty disgracefully towards her too. Oh, let’s not fumble for excuses, not here and now with my hair down. At best, let’s say I’ve been… oversensitive to…  well to the fact that she’s so young, so feminine and helpless… to so many things I want to be for Bill…
Funny business, a woman’s career : the things you drop on your way up the ladder so you can move faster, you forget you’ll need them again when you go back to being a woman. That’s one career all females have in common, whether we like it or not, being a woman, sooner or later we have to work at, no matter what other careers we’ve had or wanted, and in the last analysis, nothing is any good unless you can look up just before dinner or turn around in bed and there he is. Without that, you’re not a woman, you’re something with a French provincial office or a book full of clippings, but you’re not a woman… Slow curtain… The End. »

Incident de frontière – Chapitre 9

Tous les chapitres précédents sont là . Il suffit de cliquer dessus :

 Chapitre 1     Chapitre 2     Chapitre 3      Chapitre 4    Chapitre 5   Chapitre 6     Chapitre 7     Chapitre 8

Résumé des chapitres précédents :
Nous sommes à la fin du long weekend de nos neuf voyageurs. Voici quelle est la situation : Dimanche 24 mai 1970, fin de journée. Les deux breaks Peugeot 207 sont bloquées au poste frontière d’Addabousiyah, sous la surveillance de soldats syriens.
Pierre, Françoise, John et Bill sont dans la première voiture tandis que Christian, Tavia, et Jenelle sont dans la deuxième. Sur l’ordre d’un officier, Patricia et Anne ont été arrêtées et emmenées dans le poste frontière pour avoir photographié le bâtiment et une Jeep de l’armée en fond de plan d’un troupeau de moutons.

Chapitre 9

Malgré la descente du soleil sur l’horizon, la chaleur dans les voitures était devenue insupportable. Dans la Peugeot de tête, le Concerto d’Aranjuez qui s’élevait maintenant du transistor n’arrivait pas à dissiper l’angoisse des passagers. Françoise tenait très fort la main de son mari, tandis que Bill s’agitait sans arrêt sur son siège en s’épongeant la poitrine et le front et que John n’arrivait pas à se décider à sortir pour rejoindre Tavia. Christian avait regagné sa voiture en boitillant. Il y avait retrouvé Jenelle, toujours crispée sur son siège et Tavia, qui paraissait s’être endormie.

-Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? demanda Jenelle en anglais.

-Rien, on attend, répondit Christian sans la regarder.

Les soldats qui gardaient les voitures avaient rejoint leurs camarades autour de la table dans l’ombre de la toile immobile.

Le temps paraissait suspendu. Le drapeau pendait le long de son mat. Le soleil semblait s’être arrêté au-dessus des maigres arbres qui limitaient l’horizon.

Une minuscule tornade de poussière s’éleva devant les voitures. Un chien traversa la route. En passant devant la Jeep, il leva la patte sur une de ses roues. Un soldat se leva lentement, lui lança mollement une pierre et le manqua, déclenchant les rires de ses camarades.

Soudain, deux silhouettes apparurent à l’angle du poste. Malgré le soleil qui les éblouissait, les passagers des deux voitures les reconnurent immédiatement : Anne et Patricia. Elles marchaient lentement côte à côte. Elles étaient seules. L’éclairage en contre-jour Continuer la lecture de Incident de frontière – Chapitre 9